La tension monte au Gabon avant le retour du corps de l’opposant André Mba Obame

Incendie de l’ambassade du Bénin, interpellations d’opposants, mystérieuse découverte d’armes, dispositif policier renforcé à Libreville: à un an de la présidentielle, la tension monte au Gabon avant le rapatriement mardi du corps d’André Mba Obame, figure de l’opposition décédé le 12 avril au Cameroun.

“Il y a tous les ingrédients pour que ca chauffe”, indique une source judiciaire sous couvert de l’anonymat.

“L'atmosphère est perturbée depuis l'annonce de son décès par les manœuvres organisées par le pouvoir, pour ternir la qualité de notre organisation, salir ou tenter de discréditer notre parti”, accuse Zacharie Myboto le président de l’Union nationale (UN), principale formation de l’opposition et parti de Mba Obame, dit “AMO”.

Ancien puissant ministre de l’Intérieur notamment, ex-baron du régime, Mba Obame était passé dans l’opposition à la mort de Omar Bongo Ondimba, resté 41 ans au pouvoir. Candidat à la présidentielle de 2009, il avait contesté la victoire du fils de l’ex président, Ali Bongo, et s’était proclamé vainqueur du scrutin.

Par la suite, l’opposant était tombé malade et une partie de ses partisans a accusé le régime de l’avoir empoisonné, visant particulièrement le directeur de cabinet du chef de l’Etat, Maixent Accrombessi, d’origine béninoise et naturalisé gabonais.

L’annonce de sa mort a été suivie de troubles et des manifestants ont incendié l’ambassade du Bénin.

Deux membres de son parti ont été interpellés dans le cadre de l’enquête sur l’incendie alors que la télévision publique a diffusé une interview d’un jeune homme accusant l’opposition d’avoir diligenté l’attaque.

Un haut responsable du parti, Gérard Ella Nguema, a aussi été arrêté brièvement jeudi.

Il a affirmé avoir été accusé à tort d’avoir reçu “des armes” de “militaires français” en vue d’un “coup d’Etat”.

“Je n’ai rien à cacher. Je n’ai jamais été au Camp de Gaulle (camp militaire français à Libreville) (…) Je ne ferai pas de coup d’Etat”, a-t-il rétorqué à la presse.

– Bras de fer entre le pouvoir et l’opposition –

Les autorités ont d’autre part annoncé mardi à grand renfort médiatique la découverte d’une “cache d’armes” au nord de la capitale sans mettre personne en cause.

L’UN, qui nie toute implication dans l’incendie de l’ambassade du Bénin comme dans la cache d’armes, crie “au montage”, n’hésitant pas à comparer l’incendie à celui du Reichtag en 1933 ou à celui de Rome par Néron.

Enfin, le ministère de la Défense a lancé lundi une “opération de sécurisation” après avoir été informé de “la présence (aux) frontières de caisses d’armes”.

De nombreux barrages routiers sont installés dès la nuit tombée et les forces de l’ordre sont visibles aux points stratégiques de Libreville pendant la journée.

Pour l’opposition, le pouvoir cherche à “terroriser les populations et décourager ou dissuader les centaines de milliers de Gabonais qui souhaiteraient rendre un dernier hommage” à André Mba Obame.

Dans un contexte social tendu émaillé par de nombreuses grèves et une économie fragilisée par la baisse du cours du pétrole, les obsèques peuvent être pour l’opposition l’occasion d’une démonstration de force à un peu plus d’un an de la présidentielle 2016.

En coulisses, un bras de fer se noue sur les manifestations qui seront ou non autorisées pour les obséques dont le programme n’était toujours pas officiellement connu, près de deux semaines après le décès.

Selon l’opposition qui a lancé un appel aux Gabonais à s’associer massivement aux obsèques, le pouvoir tente de minimiser l’impact du retour du corps.

L’utilisation d’un stade dans un quartier populaire de Libreville a été refusée par les responsables de l’enceinte au motif qu’il “n’est malheureusement pas disponible aux dates sollicitées”.

M. Myboto de l’UN a averti que “le pouvoir en place gagnerait à faire montre de retenue et de sagesse à compter de ce jour, car l'Union nationale n'est pas capable de contenir l'émotion que pourrait afficher le peuple gabonais”.

De son côté, le camp du président Bongo a commencé à fourbir ses armes en vue de la présidentielle et a notamment organisé début avril une grande “marche pour la paix” de plusieurs milliers de personnes dans la capitale.

Le président, qui n’a pas officiellement annoncé ses intentions, devrait être candidat à sa succession face à une opposition qui, après la disparition d'”AMO” ne dispose plus d’un leader évident pour le scrutin à tour unique.

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