Un rapport le confirme: l’intervention franco-britannique en Libye a été un désastre

L’intervention militaire en Libye menée conjointement par Nicolas Sarkozy, ancien président de la République, et David Cameron, ancien Premier ministre britannique, était fondée sur «des postulats erronés», «une analyse partielle» de la situation et sans vérification préalable de la «menace réelle» qui pesait sur les civils libyens.

Voilà, en quelques mots, la conclusion du rapport accablant de la commission des affaires étrangères du Royaume-Uni, rendu public le 14 septembre 2016 et relayé par le Guardian, portant sur les conditions de l’intervention militaire sur le sol libyen et le renversement de Mouammar Kadhafi, en 2011.

Le rapport souligne que le Royaume-Uni, comme la France, se sont appuyés sur des renseignements imprécis au moment de l’intervention militaire et se sont engagés sans avoir en tête une stratégie claire pour les jours et les mois qui suivront le renversement du dictateur. Pour Cripin Blunt, le président de la commission, David Cameron aurait également pu réfléchir à d’autres options et à des alternatives qui auraient pu mener à de meilleurs résultats:

«Un engagement politique aurait pu permettre de protéger la population, de changer et de réformer le régime à un coût moindre pour le Royaume-Uni et la Libye. Le Royaume-Uni n'aurait rien perdu en suivant ces pistes, au lieu de se focaliser exclusivement sur le changement de régime par des moyens militaires.»

Le rapport pose ainsi David Cameron comme «le responsable final de l'échec à développer une stratégie cohérente en Libye». Selon les députés, David Cameron aurait dû être en mesure de savoir que des groupes islamistes radicaux allaient profiter de la rébellion pour s’imposer. La Libye, rappelons-le, a depuis sombré dans un chaos dans lequel force ou autorité politique ne parvient à s’imposer à l’ensemble du pays.

«Les actions du Royaume-Uni en Libye se sont inscrites dans le cadre d’une intervention mal conçue, dont les résultats se font encore ressentir aujourd’hui», ajoute Crispin Blunt qui fait ainsi écho aux différents groupes rebelles qui continuent de s’affronter sur le territoire, à la présence de l’État islamique ou encore aux vastes réseaux de passeurs qui se sont organisés autour du littoral libyen.

«L’enthousiasme français» critiqué

Crispin Blunt, n’épargne pas non plus la France et Nicolas Sarkozy, président de la République à l’époque de l’intervention militaire. «Nous avons été entraînés par l’enthousiasme français à intervenir», a-t-il confié à la BBC. Il estime, par ailleurs, que les menaces pesant sur les habitants de Benghazi «ont été grossièrement exagérées». Le rapport ajoute que Londres, comme Paris, n’ont pu «vérifier la menace réelle que le régime de Kadhafi faisait peser sur les civils» et ont pris «au pied de la lettre, de manière sélective, certains éléments de la rhétorique de Mouammar Kadhafi».

Le rapport fait également état des conclusions de Sidney Blumenthal, un conseiller d’Hillary Clinton –alors secrétaire d’État–, qui détaille les motivations de Nicolas Sarkozy dans cette intervention. Il les résume en cinq points: «accéder au pétrole libyen; accroître l'influence de la France en Afrique du Nord; servir son propre intérêt politique en France; fournir à l'armée française l'occasion d'asseoir sa position dans le monde; couper court aux ambitions de Kadhafi visant à supplanter la domination de la France sur l'Afrique francophone». Le rapport souligne que quatre de ces motivations concernaient des intérêts purement nationaux et qu’une autre portait uniquement sur une ambition politique personnelle de l’ancien président. Aucune mention, en revanche, de la protection des civils réprimés par le dictateur libyen, note France 24.

Le rapport rejoint, dans une certaine mesure, les critiques de Barack Obama qui, dans le magazine The Atlantic, avait pointé l’imprévoyance des forces européennes engagées –et celle de leurs responsables– dans cette intervention. «Lorsque je me demande pourquoi cela a mal tourné, je réalise que j’étais convaincu que les Européens –étant donné la proximité de la Libye– seraient plus impliqués dans le suivi», explique-t-il. Le président américain estime que David Cameron était alors «distrait par d’autres choses» et Nicolas Sarkozy occupé à «voulait claironner ses succès dans la campagne aérienne alors que nous avions détruit toutes les défenses anti-aériennes».

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