Vous souvenez-vous de notre article paru sur www.cameroonvoice.com le 23 Août 2013 ? Il parlait des opportunités offertes dans les régions du Québec. Opportunités que beaucoup de nouveaux immigrants ne connaissent pas ou n’osent pas explorer. Bien entendu, certains vous diront qu’il n’y a pas de travail au Québec et encore moins en dehors des grandes villes …
Toutes les régions n’ont certes pas les mêmes besoins en main d’œuvre et toutes ne sont pas des terres d’immigration pour les nouveaux arrivants mais nombreuses d’entre elles ont su attirer, accueillir et retenir leur immigrants en leur offrant ainsi un nouveau « chez eux » et une meilleure qualité de vie comparé à celle de leur pays d’origine ou de la ville dans laquelle ils étaient installés initialement (Montréal ou Québec par exemple).
Nous vous présentons ici un article venant appuyer nos propos de l’été dernier. Il date du 7 mai 2014. Ecrit par la journaliste Isabelle Grégoire (photos de Caroline Hayeur), il est paru dans le célèbre Magazine l’Actualité, grand bimensuel Québécois d’information sur l’actualité et édité à plus de 240 000 exemplaires (www.lactualité.com). Cet article dresse le portrait d’une dizaine d’africains originaires du Cameroun, du Mali, de la Côte d’Ivoire, du Gabon, de la Tunisie, de l’Algérie et du Congo. Attirés par des emplois bien rémunérés, la majorité d’entre eux sont passés d’une température de 40 degrés Celsius à – 40 pour refaire leur vie.
Voici quelques portraits accompagnés de photos qui illustrent l’intégration professionnelle et sociale de ces néo-québécois.
Portraits photos
Quelque 200 immigrants d’origine africaine travaillent déjà dans les mines, centres de santé, foyers pour personnes âgées et organismes pour la jeunesse de la région. Parmi ces gens venus du « chaud », on compte Joan Martin Mendome Obame, agent à Développement économique Chibougamau.
Originaire du Gabon, l’homme de 28 ans a fait ses études à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) et possède un double diplôme universitaire québécois en finances et en entrepreneuriat. Il se rappelle avoir traversé le parc des Laurentides de nuit, sous la neige, pour se rendre à son entretien d’embauche !
Rencontré à près de 500 m sous terre, tout au fond de la mine de zinc Langlois, à Lebel-sur-Quévillon, le métallurgiste camerounais Yaya Hamadou, 31 ans, a quant à lui travaillé six ans en Sibérie avant d’être recruté par Nyrstar (l’entreprise qui a relancé la mine en 2011).
Inutile de dire que le froid ne l’impressionne pas ! « C’est la chaleur de l’accueil qui m’a séduit », dit cet homme réservé dont l’épouse, une Malienne, attend leur premier enfant.
« L’intégration est plus facile ici qu’en Russie », ajoute-t-il.
Même son de cloche du côté de l’électricien Yassine Elyagoubi, 39 ans, qui s’est lui aussi entiché de Lebel-sur-Quévillon.
« J’adore ma vie “icitte” ! » raconte le Tunisien, émaillant ses propos d’expressions locales.
« J’ai appris à jouer au golf et au baseball, à pêcher sous la glace, et je suis même allé à la chasse à l’ours et à l’orignal. »
Comme il le souligne, l’amour du plein air est indispensable pour s’acclimater.
À Lebel-sur-Quévillon, les « importés » – comme certains habitants les appellent – sont de plus en plus nombreux et ils insufflent à la ville un exotisme joyeux.
Avec sa boutique La Perle africaine, la Franco-Ivoirienne Hélène Legré y contribue.
« Ça met de la couleur ! » dit cette femme élégante, qui a déjà tenu un commerce à Paris… où elle a aussi été policière durant 10 ans.Son magasin regorge de tenues éclatantes, de bijoux et de pots de beurre de karité qui attirent la clientèle féminine locale.
Du beurre de karité, Ramatou Coulibaly en confectionne dans le sous-sol de la maison de Chibougamau qu’elle occupe avec son mari, Harouna Zampalegre, et leurs quatre enfants.
Pour son entreprise, Merveilles d’Afrique et d’ailleurs, elle importe aussi des vêtements et divers trésors d’artisanat qu’elle vend dans des foires commerciales et au centre commercial de sa ville d’adoption.
C’est en 2004 que cette famille originaire de la Côte d’Ivoire a bravé la froidure pour s’installer à Chibougamau. « On était les premiers Noirs ici ! » s’amuse Ramatou, 50 ans. Dix ans plus tard, ils sont toujours là.
Bien que diplômés et expérimentés – Ramatou en travail social et Harouna en génie informatique -, tous deux ont galéré pendant trois ans à Montréal sans trouver de boulot à leur mesure. Jusqu’à ce que Harouna soit recruté comme informaticien par le Conseil cri de la santé et des services sociaux de la Baie-James. « C’était une chance de faire enfin mes preuves au Québec, alors je n’ai pas hésité », raconte ce colosse à la voix douce, qui passe la semaine dans le village cri de Mistassini et rentre la fin de semaine à Chibougamau, à deux heures de route. « Mais beaucoup de Montréalais nous déconseillaient de partir si loin. »
La famille n’a jamais regretté son choix. « Si tu veux connaître le vrai Québec, c’est en région qu’il faut aller. Nous avons été reçus à bras ouverts et nous nous sommes vite intégrés », dit Ramatou.
Certains immigrants font même de la publicité pour le Nord-du-Québec. Comme Samir Bouzenad, Algérien de 32 ans, trieur de bois à Chantiers Chibougamau, le principal employeur local (500 personnes).
C’est d’abord par amour qu’il a emménagé ici, en 2011. Marié à une Québécoise, Julie Tremblay (à droite), aussitôt adopté par sa belle-famille, il est si heureux qu’il a convaincu son ami d’enfance, Mazouz, de venir le rejoindre. « Mazouz a épousé une amie de ma femme, dont il a fait la connaissance quand on échangeait tous ensemble sur Skype ! » explique-t-il.
Aussi encouragée par le développement économique du Nord, Chapais prévoit doubler sa population, qui atteindrait 3 000 habitants d’ici 2023. La première famille africaine à s’y installer est celle du Malien Mohamed Diarra, 32 ans, arrivé avec femme et bébé en 2013. Ce grand mince au sourire resplendissant ne passe pas inaperçu dans le coin. « Tout le monde me connaît : la presse locale a publié un article sur moi avec ma photo ! » Diplômé en sociologie et en développement local en France, il a comme les autres tenté sa chance à Montréal, en vain.
Quand le poste d’agent de développement rural à Chapais a été affiché, il s’est présenté et a été engagé sitôt son entretien par Skype bouclé. « J’ai fait des milliers de kilomètres pour venir au Québec, alors pour moi, Chapais n’est pas beaucoup plus loin ! C’est un milieu convivial et sûr, idéal pour élever des enfants. » Sa petite va maintenant à la garderie et sa conjointe a trouvé un emploi à la caisse Desjardins.
« Le » modèle d’intégration, c’est Salah Ben Hassouna (à droite), un petit moustachu rieur. Originaire de Tunisie, cet ingénieur électricien vit à Lebel-sur-Quévillon depuis 1991. Fondateur de la PME Énergie électrique du Nord, il s’est établi au bord du lac Quévillon avec sa famille. Il est intarissable sur sa qualité de vie « unique au monde ».
Hassouna est connu comme « celui qui a rallumé le feu de la Saint-Jean-Baptiste ». Après la fermeture de l’entreprise Domtar, qui avait entraîné une lourde perte en impôts fonciers, la ville n’avait plus les moyens de subventionner son feu grandiose, salué par le Guinness des records. « J’ai dit au maire que laisser s’éteindre la flamme de la Saint-Jean, c’était laisser entendre que Lebel-sur-Quévillon allait mourir. Pour moi, qui dois tout à cette ville, c’était impensable. » Il a donc fait le tour des commerces locaux et récolté 5 000 dollars pour rallumer le feu. « Depuis, c’est moi qui m’occupe de la Saint-Jean et qui prononce le discours patriotique ! »
Du côté de Chibougamau, une nouvelle activité a vu le jour : le soccer ! Fondé en 2011 par le Congolais d’origine Innot Mush’Ayuma (photo), le club compte quelque 200 membres de tous les âges, vite devenus accros.
Calme olympien, sourire aux lèvres, Innot, 50 ans, ne leur laisse pourtant rien passer. « Je n’aime pas qu’on chahute : le soccer, c’est du plaisir dans la discipline. » L’homme a été en 2011 le premier Noir élu conseiller municipal à Chibougamau. Nutritionniste de formation, spécialisé en santé publique, il a travaillé six ans comme éducateur en diabète dans les communautés cries de la Baie-James. « Les autochtones et les Africains ont beaucoup en commun, entre autres le respect des aînés », dit-il.
Aujourd’hui coordonnateur régional du Comité jamésien de promotion des saines habitudes de vie, Innot continue de collaborer avec les Cris, qui l’ont adopté.
Paulin Iloko, 13 ans, reçoit des indications de la part de son ami pour une partie de pêche organisée à l’occasion du barbecue du Groupe interculturel du Nord, un organisme fondé à Chibougamau par le Congolais Maximilien Iloko-Fundi. Plus tard en soirée, des dizaines d’Africains et de Québécois se sont réunis autour du feu pour discuter, danser, draguer…
D’autres témoignages d’africains qui ont choisi le Nord…
Ramatou Coulibaly et Harouna Zampalegre sont de la race des pionniers. En 2004, ce couple originaire de la Côte d’Ivoire a bravé la froidure pour s’installer à Chibougamau, dans le Nord-du-Québec, avec ses quatre enfants. « On était les premiers Noirs ici ! » s’amuse Ramatou, 50 ans, cheveux lissés et poignée de main solide. Dix ans plus tard, ils sont toujours là… rejoints par des dizaines d’Africains, eux aussi attirés par des emplois intéressants et la vie paisible près de la nature.
Bien que diplômés et expérimentés – Ramatou en travail social et Harouna en génie informatique -, tous deux ont galéré pendant trois ans à Montréal sans trouver de boulot à leur mesure. Jusqu’à ce que Harouna soit recruté comme informaticien par le Conseil cri de la santé et des services sociaux de la Baie-James. « C’était une chance de faire enfin mes preuves au Québec, et je n’ai pas hésité », raconte ce colosse à la voix douce, qui passe la semaine dans le village cri de Mistissini et rentre la fin de semaine à Chibougamau, à deux heures de route. « Mais beaucoup de Montréalais nous déconseillaient de partir si loin. »
Un choix que la famille n’a jamais regretté. Technicienne en éducation spécialisée à l’école primaire Notre-Dame-du-Rosaire, à Chibougamau, présidente de son syndicat, Ramatou ne reviendrait à Montréal pour rien au monde. « Si tu veux connaître le vrai Québec, c’est en région qu’il faut aller. Nous avons été reçus à bras ouverts et nous sommes vite intégrés. » Les enfants, âgés de 10 à 26 ans, confirment. « Je suis une pure Québécoise », résume la petite dernière, Esther Kadidia, patineuse artistique dans le club des Lames givrées.
Un Nord qui a besoin de « bras »
Dopée par le Plan Nord, Chibougamau a besoin de main-d’œuvre qualifiée. Fondée en 1954, cette municipalité, la plus importante de la région avec ses quelque 7 500 habitants, veut attirer les travailleurs et leurs familles ; en témoignent les nouveaux quartiers résidentiels et les garderies. L’organisme Attraction Nord leur offre une pléiade de services, qui vont de l’aide au logement jusqu’au placement de conjoint.
Selon la Table jamésienne de concertation minière, environ 7 500 nouveaux emplois seront à pourvoir dans la région d’ici 2022, sans compter les emplois indirects : construction, santé, éducation, administration… « Même si la totalité des Cris et des Jamésiens voulaient travailler dans les différents chantiers miniers et autres, on ne pourrait pourvoir tous les postes, dit Manon Cyr, l’énergique mairesse de Chibougamau. En plus des Québécois, nous ciblons donc les immigrants, souvent très qualifiés, mais sans emploi dans leur domaine dans le sud de la province. »
Quelque 200 immigrants d’origine africaine et maghrébine travaillent déjà dans les mines, centres de santé, foyers pour personnes âgées et organismes pour la jeunesse de la région. Beaucoup sont venus en famille, vivant surtout à Chibougamau, mais aussi à Chapais, Lebel-sur-Quévillon et Matagami. Dans l’ensemble, tous ceux rencontrés se disent bien intégrés, au boulot comme dans la vie quotidienne. « Ils sont perçus comme n’importe quel résidant », dit Denis Lemoyne, directeur général de la Société de développement économique de Lebel-sur-Quévillon.
Une intégration pas toujours facile…
Les « importés » suscitent parfois des réticences. Par exemple, à l’hiver 2013, le restaurant McDonald’s de Chibougamau a recruté dans leur pays une dizaine de Marocains. Un employé chibougamois s’est plaint dans la presse locale d’avoir vu ses heures réduites et d’avoir été privé d’une promotion au profit d’un Marocain embauché après lui. Et à Lebel-sur-Quévillon, en 2011, on a fait des gorges chaudes de la mésaventure d’un travailleur minier tunisien. En état d’ébriété, l’homme a brûlé un arrêt et défoncé un mur du poste de police avec sa voiture.
Pour éviter les dérapages et aider les uns et les autres à se connaître, un comité interculturel a été créé à Lebel-sur-Quévillon en 2013. « Ça permet de recréer une famille », dit Nadège Guiro Abiba, une Burkinabée mariée avec un travailleur minier québécois. Enseignante de formation, elle n’a pas encore trouvé d’emploi dans son domaine. « La barrière de la couleur de la peau existe, il ne faut pas se leurrer. Avant de t’engager, on va toujours te préférer une personne originaire de Quévillon. »
À Chibougamau aussi, les immigrants s’organisent. Le Groupe interculturel du Nord a été créé par Maximilien Iloko-Fundi, un Congolais d’origine qui travaille comme agent de planification, programmation et recherche au Centre régional de santé et services sociaux de la Baie-James depuis 2008. « Je me considère comme un Jamésien », dit ce père de trois enfants, dont le benjamin est né ici. « Mon devoir de citoyen, c’est de m’impliquer et de redonner à la ville qui nous a si bien accueillis.»
L’atmosphère qui règne en ce samedi soir au centre de plein air Mont Chalco, près du centre-ville de Chibougamau, prouve que Maximilien a réussi. Des dizaines d’Africains et de Québécois sont réunis autour d’un immense barbecue communautaire. Bière ou verre de vin à la main, on discute près du feu, on danse, on se drague…
Parmi les Africains rencontrés ce soir-là : cinq étudiants du Centre de formation professionnelle de la Baie-James. Assurés d’être recrutés sur place par une entreprise minière ou forestière une fois leur diplôme en main, ils ont quitté Montréal sans regret. L’ex-informaticien camerounais Jules Kengne Fotso a décidé de se reconvertir dans la conduite de machine de traitement de minerai. « Avec la mise en service annoncée de mines d’or, de fer et de diamant, le timing est bon, dit-il. Chaque fois qu’on descend voir nos amis restés à Montréal, on les encourage à monter. »
Tous ces pionniers sont en train de bâtir un Nord différent. Resteront-ils ? Certains envisagent de partir lorsque leurs enfants entreront au cégep ou à l’université. Mais la majorité de ceux rencontrés ne pourraient se résoudre à perdre leur Nord. « Il ne faut pas avoir froid aux yeux pour venir ici, dit Harouna Zampalegre. Mais une fois qu’on a survécu au premier hiver, on découvre une région très attachante. »
Source : Le Magazine l’Actualité (www.lactualité.com). Textes d’Isabelle Grégoire et photos de Caroline Hayeur.
Le 4 Juillet 2014
Danielle ELLEOUET – Rédactrice-
Consultante Réglementée en Immigration Canadienne
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