Michèle Ndoki, Vice présidente du directoire des femmes au Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC), actuellement détenu artbitrairement à la prison centrale de Kodengui de Yaoundé. |
LAISSONS ENTRER LA LUMIERE
“Les gens du parti du dictateur ne connaissent qu’un langage, les coups. Coups de matraque distribués toujours généralement à tort et à travers, bien sûr coups de fusil ou de pistolet tirés de préférence à bout portant ou dans le tas, coups de Jarnac divers, spécialité coutumière aux groupes humains que le courage n’étouffe pas.
Quant aux chefs de l’opposition, ce sont des maîtres de la rhétorique de l’indignation et de la dénonciation, de vraies virtuoses pour qui aucune figure de style n’a de secret. Coups de gueule contre coups de canon, fleurs de rhétorique contre fleurs de cimetière et autres pissenlits, c’est en somme l’éternel conflit du pot de terre contre le pot de fer”.
Ces mots sont de Mongo Beti dans son avant-dernière œuvre, “Trop de soleil tue l’amour”, publiée dans les derniers mois du siècle dernier, en 1999 donc. Vingt ans plus tard, qui pourrait dire qu’ils ne sont pas d’une brûlante actualité ? Alors que nous observons, avec un mélange de tristesse et d’envie qui n’empêche pas la joie sincère pour ce peuple frère, les algériens et les soudanais qui réécrivent leur histoire, la question nous taraude, nous torture : Qu’avons-nous donc manqué ?
Dieu et ceux qui nous connaissent un tant soit peu savent que nous autres leaders ne sommes pas parfaits : nous avons l’ego surdimensionné et trop souvent le doute et l’orgueil nous aveuglent. Il reste que les pas qui nous ont mené ici ainsi que bien malgré nous presque 147 innocents (amis, fidèles, partisans, mais aussi passants, surtout passants), ces pas étaient guidés par un désir sincère de mieux, de plus pour cette Terre bénie que nous aimons tant. Nous l’aimons d’un amour qui embrasse les plus humbles de ses enfants, notre chair, notre sang. Il reste que c’est plus fort que nous, il faut le marteler : nous continuons de dire que ces pas doivent nous mener au Cameroun que nous méritons : Yen Ekombo’a mwaye, wa ndutu e titi no, ce pays de Lumière, où la souffrance n’existe pas. Notre présence ici, notre futur retour parmi vous, ont un sens : celui de justifier Roger électricien, venu changer des ampoules chez Albert Dzongang ce 28 janvier 2019, qui n’a pas pu rentrer chez lui après avoir rempli son office parce que la maison de son client était encerclée.
Roger n’est plus le même depuis ; il est passé d’électricien, mari et père essayant d’avancer sans trop de mal dans la vie, à suspect, puis inculpé d’hostilité contre la patrie, insurrection, rébellion, etc. Lui qui avait réussi à devenir un homme respectable, gagnant honnêtement sa vie et celle des personnes à sa charge, doit maintenant compter sur la générosité d’inconnus pour se nourrir. Il est détenu à Kondengui à plusieurs centaines de kilomètres de sa famille.
Roger n’a pas choisi, Roger n’a rien fait. Nos 147 compatriotes enfermés depuis plus de deux mois à la prison centrale de Kondengui n’ont rien fait. Pas plus que les 20 autres qui ont été arrêtés à Yaoundé IV alors qu’ils faisaient le travail de la commune : curer les caniveaux. Ce sont des victimes, non pas du dictateur et de ses serviteurs, mais de notre passivité. Il faut bien que ça s’arrête.
Avant que la folie, la paranoïa et la lâcheté nous aient tous plongés dans les affres de la guerre, laissez entrer la lumière. Bien sûr que la nuit finit toujours par laisser la place au soleil, mais comment en profiter, si, Enfants de ma Terre, vous laissez obstinément vos fenêtres fermées ? Dehors il y a peut-être du danger, mais dehors c’est là où on trouve la vie. Dehors, il y a des Roger, des Mme Tchuenkam, militante à Douala III, de toutes les manifestations du parti et qui n’a jamais brigué aucun mandat, dont la seule ambition est de voir ses enfants trouver un bon emploi et lui donner des petits-enfants qui aimeront Dieu plus que tout et leur prochain comme eux-mêmes. Mme Tchuenkam est aussi incarcérée à Kondengui depuis le 28 janvier. Elle était au mauvais endroit au mauvais moment. La question à se poser quand on pense à elle et à ses 147 compagnons d’infortune est : le bon endroit c’est où, le bon moment c’est quand ?
Partout ailleurs éclosent des nations purifiées et enceintes d’espoirs et d’ambitions louables. La perfection n’est pas de ce monde, mais le Bien et le Beau, oui. Ils passent par le retour dans leurs familles des 147 victimes du dictateur dont les noms suivent :
Ahmed Abdourahmane Anoumedem Pierre Assolefack Cyrille Momo Atso Julienne Christelle Chomssem Foadjo Felicien Dafem Roger Dasi Kamsu Valdez Djiekou Mouaffi Jean Paul Djimeli Yili Eric Djiotig Fomekong Franck Xavier Djoko Jean Claude Djoko Talo Bertrand Nagor Djomou Kuate Marcelle Djouazing Jules Noel Djoumessi Kenfack Cedric Djoumessi Leon Thomas Dongue Rodrigue Eric Ebohi Parfait Emga Pierre Enow Tambi Francis Eyengue Nzima David Fidel Fautier Souop Alain Josue Fezeu Pierre Foaling Fotso Georges Fopoussi Tocfjeu Evariste Constantin Fotsin Kuekoudoum Talla Foudjin Kamdem Guy Merlin Fouelefack Tsamo Denis Christian Foulifack Ngadang Eugene Gatchuessi Dieudonne Gbetnkom Mohamed Nadin Guiadem Epse Tchuinkam Nziko Florence Guiakam Jean Raymond Homsi Jean Baptiste Ifubeh Andreas Tangang Jouonmegne Emmanuel Kadjiekamte Aubin Raoul Kalassi Alain Plycarpe Kamdem Dibel Kamdoum Takam Maxime Kamegne Epse Noutchang Georgette Laure Kameni Mathias Kamgaing Jacques Kamto Thierry Kegne Ambroise Kengne Vo Umbi Andre Kengnegne Kauche Epse Fondjo Elise Kom Fotso Kondjang Kondjang Charles Konga Rigobert Kouam Kamguia Franck Kouam Guy Laurent Kouokap Gilles Kouyoue Pele Henri Kuebatcha Jean Salvador Kuimo Marie Colette Leugoud Taboue Verlaine Longmene Mfogha Armand Blaise Magatsing Magne Marthe Mbuenga Manga Herve Romeo Mefo Lucienne Megaptche Poumda Ghislain Mekoulou Eric Membot Isabele Metago Olga Momo Brice Bienvenu Momo Kevin Steve Mongang Kangang Patrie Mouaffi Jean Claude Moumeni Christian Marcel Moyo Kengne Lionel Muthaga Sylvanus Thuh Nadjo |
Nana Paul Nana Roger Nana Serge Branko Ndefo Gache Ndiagnda Eric Bertrand Ndongla Jaures Ngadeu Raphael Ngahana Yokam Eugene Ngaketcha Franck Judiciaire Ngaleu Annick Ngandjui Jean Ngangue Duhamel Ngankam Fozing Romaric Landry Ngankam Pierre Gaetan Ngondjeu Roland Ngono Modeste Ngueyap Epse Pone Anne Nguiekom Kuitche Blandine Carme Nguimetsop Adele Nintidem Cresence Nitcheu Victor Njufack Stephane Nkakapen Tagne Charly Steve Nofouhio Tchio Jose Junior Nonkam Kamga Epse Tumamo Anne Marguerite Noukeu Kwedji Achille Nsiyip Mete Leatare Nyamsi Jean Nyayo Ngueutmen Michael Ulrich Nzega Serge Kevin Nzokou Desire Ombanolil Charles Pemha Nina Puengue Neuyim Pierre Pufong Victor Sah Marius Samiratou Matcheundem Seugoua Ekeu Franck Roland Siewe Eric Sighomnwe Joseph Simo Maxime Boris Soh Joseph Tajiogue Demanou Aubin Romeale Takafo Dongmo Antoine Arnaud Takam Eric Michel Tallah Emmanuel Tamo Bonhtchueng Tanetsing Takamgo Um Idrice Tatsinkou Lonkeng Narcisse Valerie Tchakui Tchatchoua Valery Tchamago Clement Tchapock Raoul Tchokomani Raphael Tchokote Leopold Tchopa Theodore Tchouaffa Nouka Jean Bonheur Tchuiya Njiowou Agnes Flore Tefouet Thouangang Clement Tene Andre Tiayo Tenkeu Roger Tiogning Littbarski Tiomo Michel Toukam Pascal Touko Thomas Tsanang Kuete Medard Florien Tsiedwo Felix Twengoue Ghislain Herriot Wafo Jasmin Wapi Roger Yangoua Armand Yemga Serge Yimeli Sylvain Youmbi Serges Zonkeu Yannick |
Vous pouvez rendre ce retour possible. Vous ferez la différence pour eux, pour nous, pour vous. Il suffit d’unir vos voix à celles de ceux qui réclament leur libération. Demandons leur libération au dictateur et à ses serviteurs, aux juges devant lesquels ils doivent comparaitre, au Ministère Public qui doit trouver des motifs de poursuite. Faisons entrer la lumière, renvoyons les chez eux.
Love you all,
Michèle NDOKI