Cmr : Comment le régime Biya et ses amis ont tenté en vain de faire échec au boycott de la Journée Internationale de la Femme 2020

Est-ce donc au prix du viol moral des femmes et des violations de leurs droits, que madame Chantal Biya, épouse du président de la République, a pu jouir du plaisir de voir défiler à ses pieds, le 8 mars dernier, de nombreuses femmes camerounaises à l’occasion de la Journée Internationale de la Femme 2020 ? La question se pose de manière lancinante, depuis la découverte d’une note de service interne adressée par la hiérarchie d’une entreprise privée, menaçant « de lourdes sanctions disciplinaires » son  personnel féminin qui, même pour des raisons de maladie grave, oserait ne pas défiler.   

Après le boycott retentissant (à l’appel du MRC de Maurice Kamto)  des élections législatives et municipales de février dernier qui a plongé dans l’émoi tout le régime et fait sortir de ses gonds son chef, le président Paul Biya dont on se souvient de la petite phrase sur « certains petits partis politiques », c’est le boycott de la Journée Internationale de la Femme (JIF), cette fois-ci à l’initiative des “mères de la Nations”, qui a fait paniquer le régime, au point où ses obligés se sont sentis dans l’obligation  de venir à sa rescousse.

CICAM et VIETTEL au secours des partisans de la participation à la JIF

C’est la société industrielle publique de textile dénommée Cotonnière Industrielle du Cameroun (CICAM), qui a ouvert le bal en tentant d’anticiper l’inéluctable déculottée annoncée de son principal produit dédié à la célébration de la JIF, à savoir “le pagne du 8 mars”, en  informer les Camerounais(es), une fois n’est pas coutume, au sujet de ses difficultés : « Des difficultés d’ordre structurel et conjoncturel sont à l’origine d’une production mitigée du pagne du 8 mars en 2020 (…) Une panne est survenue le 24 décembre 2019 sur le graveur, une machine qui coûte plus de 200 millions de FCFA, et qui nous a obligé d’aller graver les cylindres en Europe,  avec pour conséquence, un grand retard dans le début de la production », faisait alors savoir le Directeur Général de la CICAM, monsieur Edouard Ebah Abada. Sous entendu, Si le “pagne du 8 mars” produit par la CICAM n’est pas arboré le 8 mars 2020, ce sera à cause des problèmes  de mécanique de la CICAM même si l’on ne fera à personne de révéler qu’en pareille occurrence, la compagnie camerounaise de textile sait souvent très bien sous-traiter le marché avec le partenaire chinois, spécialiste des produits bon marché et d’aspect très reluisant, mais de qualité tout simplement quelconque- et non du fait de l’adhésion à un quelconque mot d’ordre de boycott du pagne lancé par les amazones de la plateforme citoyenne Stand Up Cameroon(*).

Le 21 février dernier Alice Nkom, Charlotte Tchakounté, Michèle Ndoki et Edith Kah Walla ont appelé les femmes à se vêtir en noir le 8 mars pour protester contre les souffrances infligées par las va-t-en-guerre de tous bords à leurs époux, enfants et sœurs

Seulement voilà, le Cameroun officiel n’est pas du type à se satisfaire d’une contre-offensive communicationnelle dérisoire opérée par un DG de la CICAM à peine audible. Il faut faire grand ! Mais la malédiction de l’illégitimité qui frappe le régime aidant, quand il veut faire grand, il finit par faire gros. Et cela donne le genre d’histoire ou des entreprises installées au Cameroun, désireuses d’être bien vues par ce régime, même sans y avoir été formellement invitées, se mêlent de paraitre “républicaines”, “citoyennes”, “responsables”  “patriotes”,  et tutti quanti, en obligeant les femmes à faire acte de présence, « veux ou pas », à la grande parade habituelle marquant les festivités de la 36ème édition de la JIF. 

Viol moral

L’illustration de cette façon de prendre les femmes par-dessous la jambe que l’on peut qualifier de viol moral, viendrait de la filiale camerounaise de la compagnie vietnamienne VIETTEL, opérateur de télécommunication mobile évoluant au Cameroun sous le nom de marque Nexttel, dont le directeur des Ressources humaines, si l’on en croit la note interne ci-dessous ayant fuité, aurait décidé rien moins que d’obliger les femmes de l’entreprise à prendre part au défilé à Yaoundé et Douala,  villes métropolitaines dont le climat ambiant résumerait à lui seul la situation sociopolitique prévalant sur l’ensemble du pays.

Copie de la “note Interne” de Viettel (Nexttel) instruisant les femmes de ne pas, sous quel que prétexte que ce soit, tenter d’essayer d’oser avoir l’outrecuidante opiniâtreté de vouloir penser songer à être absente de la parade d’allégeance à la première dame du Cameroun, « Madame la présidente » Chantal Biya.

VIETTEL (Nexttel) ne serait  cependant la seule entreprise à s’être ainsi sentie obligée de donner un coup de main au régime soucieux de voir le maximum de femmes célébrer le 8 mars 2020, non pas en raison d’une quelconque sollicitude vis-à-vis de la gent féminine, mais pour se donner une occasion de triompher de l’adversité que  représentait l’appel au boycott de la JIF 2020.

Malheureusement, faute d’éléments probants à l’instar de la “Note Interne” de  Viettel, Cameroonvoice ne pourra pas citer les autres entreprises dont les noms lui ont été communiqués, qui ont poussé aussi loin le bouchon de l’ignoble en obligeant les femmes à faire ce qu’elles ne voulaient pas, en cette Journée Internationale de la Femme qui avait paradoxalement pour thème : « Je suis de la Génération Égalité : Levez-vous pour les droits des femmes ».

A l’analyse, ce que l’on peut tirer comme leçon de cette étrange situation c’est que les mots d’ordre de boycott de l’opposition sociale ou politique font désormais plus mal au Cameroun que toute autre forme de protestation, tant cette forme cinglante de refus révèle, mieux que toute autre l’illégitimité d’un régime, qui ne peut plus alors contourner l’illustration de celle-ci qu’en usant soit de la force brutale, soit de la plus abjecte roublardise.

Inopérantes stratégies anti-boycott

Démonstration en est faite depuis bientôt quatre ans avec le lockdown imposé par les séparatistes anglophones dans le NOSO, et particulièrement respecté par les populations, que ce soit par adhésion ou par peur de représailles : les placements de scellés aux portes des boutiques dans les marchés, ou bien d’autres grands établissements, les suspensions d’agences de transports et autres incendies des marchés et des établissements scolaires, les enlèvements simulés de personnes suivis de demande de  rançon… n’ont pas fait varier les sentiments des populations qui ont préférer boire jusqu’à la lie le calice des privations qu’implique l’acte de désobéissance civile, plutôt que de donner l’impression qu’elles légitimaient le régime de Yaoundé qu’elles considèrent comme annexionnistes en lieu et place des groupes armés ambazoniens qui, même s’ils se révèlent faux libérateurs et vrais harceleurs, se sont montrés à leurs débuts, les vengeurs de ces anglophones tués, arrêtés et déportés dans des centres de torture situés à des centaines de kilomètres de leurs régions d’origine.      

(*) A la suite du massacre dans la localité de Ngarbuh (perpétré supposément par l’armée camerounaise, du moins si l’on en croit des ONGs locales et internationales citant des témoins oculaires) qui avait couté la vie à près d’une quarantaines d’anglophones,  des femmes leaders camerounaises, avec pour  quatuor de tête les avocates Mes Alice Nkom, Charlotte Tchakounté, Michèle Ndoki et la femme politique Edith Kah Walla ont entrepris d’interpeler les femmes sur le fait  que par ces temps de guerres et souffrances multiformes au Cameroun, elles doivent signifier aux gouvernants locaux, aux séparatistes anglophones et autres terroristes de tous bords –islamistes à l’Extrême-Nord, pro-séparatistes et pro-gouvernementaux au No-So, et à leurs partenaires extérieurs respectifs, bref, à tous les amoureux du bain de sang, que celles à qui incombe en premier le don de la vie, en ont par-dessus la tête, de cette boucherie humaine  que des êtres, apparemment humains, donnent à voir au monde à partir du territoire camerounais. Pour se faire, elles avaient prescrit le boycott des festivités

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