Cameroun : Maurice Kamto réagit aux “pourparlers” présumés entre gouvernement camerounais et sécessionnistes anglophones

DECLARATION SUR LES CONTACTS NON OFFICIALISES ENTRE LES LEADERS SEPARATISTES EMPRISONNES ET LE GOUVERNEMENT

Ecarté par la force de la présidence de la République après son élection en 2018, Maurice Kamto n’en reste pas moins préoccupé par la situation au Cameroun anglophone. Comme il l’est du reste pour tout ce qui touche le Cameroun, de près ou de loin. Aussi a-t-il régi dimanche aux allégations relatives à des pourparlers qui auraient lieu depuis quelques jours entre les autorités camerounaises et les leaders anglophones condamnés à la prison à perpétuité pour avoir dirigé, avant leur arrestation début 2018, un mouvement ayant des visées indépendantistes pour les deux régions anglophones camerounaises, le Nord-ouest et le Sud-ouest (NoSo).

Comme à l’accoutumée, le chantre de la paix qu’est le leader du MRC apprécie positivement ce qui pourrait être la conversion du pouvoir de Yaoundé au seul préalable vrai, valable et conséquent susceptible de drainer la normalisation de la situation dans le Noso. Il n’en rappelle pas moins que les mêmes causes produisant les mêmes effets, toute tentative de s’écarter des normes d’un vrai dialogue et des conditions qui vont avec et qu’il avait déjà recensées par le passé, que soit pendant la campagne électorale de l’élection présidentielle de 2018 ou à la veille du soi-disant grand Dialogue National de septembre-octobre 2019 qui ne fut en réalité qu’un monologue du régime Biya avec le régime Biya, ferait s’enliser la situation.

Lire ci-dessous l’intégralité de la réaction de l’ancien candidat à l’élection présidentielle du 7 octobre 2018.

Le public a appris, par des voies non officielles, que le 02 juillet 2020 il y aurait eu un contact entre le Gouvernement et des leaders séparatistes anglophones actuellement emprisonnés à la Prison Principale de Yaoundé, conduits par Monsieur Sisiku AYUK TABE, en vue d’un cessez-le-feu. Cette rencontre serait la conséquence de l’appel au « Cessez-le feu mondial » lancé le 23 mars 2020 par le Secrétaire général des Nations Unies dans le cadre de la lutte contre la pandémie de la COVID-19 et de la résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies appelant à une trêve mondiale dans les conflits armés, adoptée le 1er juillet 2020, qui appelle « toutes les parties prenantes à des conflits armés à débuter immédiatement une pause humanitaire durable pendant au moins 90 jours consécutifs ».

Auraient pris part à cette rencontre, outre les leaders séparatistes et le Gouvernement, les ambassades des Etats-Unis, de France et d’Allemagne, comme facilitateurs et un représentant de l’ONU, comme principal négociateur.

Sous toutes les réserves, et au-delà de toutes considérations, le MRC se réjouit d’un tel augure. Il se félicite de la conversion, quoique fort tardive, du Gouvernement à l’idée que c’est par un cessez-le-feu, un dialogue inclusif et sincère, et des négociations directes avec les leaders séparatistes qu’il est possible de mettre fin à la guerre civile désastreuse qu’il a, de façon totalement irresponsable, déclenchée depuis bientôt quatre ans dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-ouest de notre pays.

Un tel contact, s’il était avéré, consacrerait l’échec, que nous avions prédit, du fameux Grand Dialogue National qui, en réalité, était un monologue entre le RDPC, ses alliés et l’administration.

A l’annonce officielle de la tenue de ce Grand Dialogue National, depuis la Prison Principale de Yaoundé, le 17 septembre 2019, j’avais fait savoir que le MRC ne prendrait pas part à cette rencontre, pour deux raisons : dune part, notre parti ne pouvait y participer sans notre libération préalable, les leaders alliés, moi-même et les centaines de militants et sympathisants arrêtés arbitrairement et détenus illégalement depuis plus de sept mois pour certains, à la suite des « Marches Blanches Pacifiques » des 26 janvier, 1er et 8 juin 2019 ; d’autre part, en raison des conditions d’organisation dudit Dialogue. A cet égard, j’exprimais de vives réserves sur l’issue de cette rencontre politique dont les discussions étaient volontairement faussées à la base par le pouvoir. Les principales raisons de mes réserves étaient que le Dialogue n’avait pas fait l’objet dune préparation adéquate, que les vrais leaders sécessionnistes, tant les chefs politiques que les chefs des groupes armés, n’étaient pas conviés aux discussions et que l’on avait exclu des débats l’importante question de la forme de l’Etat.

La confirmation officielle de cette prise de contact serait également la preuve que la méthodologie de sortie de crise du Gouvernement, dont les incohérences trahissent l’incompétence de ses concepteurs, a échoué. Enfin, elle signifierait l’échec de l’évanescente initiative de Genève et dune kyrielle d’autres initiatives amorcées par différents clans concurrents du régime.

La question anglophone est une réalité politique à laquelle le Cameroun doit faire face, n’en déplaise aux défenseurs zélés du régime. Cette question anglophone est au cœur des préoccupations du MRC et de mon action bien avant la crise politique puis la guerre civile actuelle.

Le MRC a soutenu de façon constante que cette question doit être discutée et réglée dans le cadre d’un dialogue républicain, et en a appelé à ceux qui sont en charge des affaires du pays aujourd’hui afin qu’ils mettent en place un cadre idoine pour ce dialogue. Le MRC est incontestablement le promoteur de cette idée de dialogue comme seule démarche adéquate pour aborder cette épineuse question, puisqu’il l’a proposée dès 2012, l’a réitéré lors de son meeting à Bamenda le 25 juin 2016 et de son meeting à Ngaoundéré le 10 décembre 2016. Devant le silence du monde face au drame camerounais, le lundi 03 avril 2017 j’ai donné une conférence de presse sur le thème « La crise anglophone et l’inquiétant attentisme de la communauté internationale ». Quelques jours après, le 12 avril 2017, l’Ambassadeur François LOUNCENY FALL, Représentant Spécial du Secrétaire Général des Nations Unies en Afrique Centrale, faisait enfin le déplacement de Yaoundé pour évoquer avec Monsieur Paul BIYA la crise dans les Régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-ouest du Cameroun.

#ctaText??#  2025 : « Aide-toi et le ciel t’aidera », Maurice Kamto réveille les Camerounais  

Pendant la campagne présidentielle d’octobre 2018, outre la réforme institutionnelle, la résolution pacifique de la crise anglophone constituait le second pilier de mon projet politique.

Après le scrutin présidentiel dont les résultats ont été volés par le conseil constitutionnel au profit de Monsieur Paul BIYA, la campagne de Résistance Nationale lancée par le MRC et ses alliés visait, outre le Non au Hold-up électoral, la fin de la guerre dans le NOSO.

Le 27 novembre 2018, alors que le Gouvernement et ses défenseurs zélés étaient encore à imposer le soutien à la guerre comme seule preuve de patriotisme j’avais appelé à :

  • Un cessez-le-feu immédiat ;
  • L’élaboration d’un processus de désarmement,
  • La réinsertion des combattants insurgés ;
  • Une amnistie générale au profit de toutes les personnes impliquées dans ce conflit
  • L’ouverture d’un dialogue avec les leaders Anglophones.

Le 17 mai 2019, alors que j’étais arbitrairement détenu en compagnie de mes leaders alliés et de centaines de mes militants, j’avais rendu public une série de propositions visant à mettre fin à la guerre par une négociation politique. Celles-ci pourraient inspirer les acteurs des discussions alléguées entre le Gouvernement et les leaders séparatistes.

Mes propositions prévoyaient :

  • Des mesures immédiates de restauration de la confiance et de la paix ;
  • La libération immédiate et sans conditions de tous les prisonniers politiques sans exclusive, aussi bien ceux arrêtés dans le cadre du conflit dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-ouest que ceux des marches blanches organisées par le MRC, les partis politiques et organisations alliés le 26 janvier 2019, à travers le Cameroun, ainsi que l’abandon par l’État de toutes les poursuites contre ces personnes ;
  • La mise en œuvre des voies et moyens pour l’évaluation et, si nécessaire, la restauration de la santé des prisonniers ainsi libérés, la reconnexion avec leurs familles, assorties des compensations appropriées ;
  • la déclaration de cessez-le-feu et le retrait des forces armées, le retour des militaires dans les casernes (BIR, Armées) ; seules la police et la gendarmerie doivent assurer le maintien de l’ordre ;
  • Le cantonnement des éléments armés engagés contre les forces de défense;
  • l’amnistie totale, immédiate et sans conditions des condamnés dans le cadre des marches blanches du 26 janvier 2019, ainsi que l’abandon des poursuites contre les personnes arrêtées dans le cadre des marches du 27 octobre 2018, notamment à Douala, dont les poursuites avaient été suspendues avant d’être relancées ;
  • la levée de toute interdiction administrative des réunions et des manifestations publiques ;
  • le libre exercice des libertés et droits fondamentaux conformément aux dispositions de notre Constitution et à celles des conventions internationales auxquelles le Cameroun est partie ;
  • la création dune commission chargée de la question anglophone, présidée par un anglophone avec pour vice-président un francophone (personnalités choisies après consultation des parties prenantes). Cette commission comprendrait une trentaine de membres également repartis entre anglophones et francophones, avec des observateurs internationaux (ONU, UA, UE, USA, France, Royaume Uni, Allemagne, Italie, Canada, Pays-Bas.) ;

La commission en charge de la question anglophone devait comprendre les sous-commissions suivantes :

  • Sous-commission « Vérité, Justice et Réconciliation » ;
  • Sous-commission « Paix et Désarmement », chargée de la création des conditions pour la garantie de la paix et de la DDR (démobilisation, désarmement et réinsertion) ;
  • Sous-commission des urgences humanitaires, de la reconstruction, du rapatriement des réfugiés et des personnes déplacées ;
  • Sous-commission de préparation du dialogue inclusif (cette sous-commission devait suivre l’organisation de la All Anglophone Conference qui devait avoir pour objectif entre autres de proposer les points concernant la question anglophone à inscrire dans l’agenda du Dialogue national inclusif, ainsi que les participants représentatifs des régions anglophones, y compris ceux de la diaspora, sous l’égide dune autorité morale).

Si les contacts annoncés entre les leaders séparatistes anglophones détenus à la Prison Principale de Yaoundé et le Gouvernement camerounais étaient avérés, nous demeurons convaincus que le schéma ci-dessus ouvrirait des perspectives sérieuses de sortie de crise et d’une résolution durable non seulement du conflit armé dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-ouest, mais aussi des autres crises multiformes qui minent notre pays.

Yaoundé, le 05 juillet 2020 L e Président National Maurice KAMTO

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