Conformément à la pratique françafricaine de la prise et de la conservation du pouvoir par les plus brutaux et les sanguinaires seigneurs de guerre au service de la France, le défunt président Tchadien devrait emporter avec lui le Tchad dans sa tombe, et la façonner dans l’au-delà avant de la restituer au peuple tchadien qui ont commis ? C’est ce que semble vouloir faire croire la France, principal soutien et mentor des dictateurs d’Afrique Francophone, accusée par certains d’être le commanditaire présumé de l’assassinat d’un pion devenu un peu plus rebelle qu’à son tour au fur et à mesure qu’il montait en grade dans son rôle de “gendarme du Sahel”.
C’est un communiqué rendu public mardi même, jour du drame qui a coûté la vie à monseu par le ministre français des Affaires étrangères, l’inénarrable Jean-Yves Le Drian habitué à rater toutes les occasions de s’abstenir d’une absurdité, qui met la puce à l’oreille des observateurs.
Si l’on en croit en effet la teneur de la déclaration de monsieur Le Drian, l’acte inconstitutionnel posé mardi par l’armée tchadienne concomitamment à l’annonce du décès du maître de N’Djamena, doit être purement et simplement validé. Il s’agit de la création séance tenante d’un Conseil Militaire de transition, la nomination à sa tête du fils du président décédé qui assumera les fonctions de chef de l’Etat et donc de Commandant en chef des Armées. Sans oublier la dissolution du gouvernement et de l’Assemblée nationale qui sont des actes caractéristiques d’un coup d’État militaire.
Difficile de ne pas interpréter comme une caution au coup d’État de la bande à Deby Junior la réaction de la France qui, tout en disant se tenir « aux côtés du peuple tchadien » note sans la moindre nuance qu’« une transition politique s’ouvre à présent, conduite par le Conseil militaire de transition », et comme pour s’en féliciter ou donner le ton de l’attitude passive ou attentiste qui doit être adoptée par tout le monde après cette entourloupe, souligne la possibilité que cette transition aboutisse « à l’issue d’une durée limitée à la mise en place d’un gouvernement civil et inclusif dans l’intérêt du pays et du peule tchadien ».
Mais quid donc de la Constitution tchadienne du 14 décembre 2020 dont les articles 81 et 82 traitent des stipulations relatives à la vacance au sommet de l’État de la manière suivante :
- « Article 81 : En cas de vacance de la Présidence de la République pour quelque cause que ce soit ou d’empêchement définitif constaté par la Cour Suprême saisie par le Gouvernement et statuant à la majorité absolue de ses membres, les attributions du Président de la République, à l’exception des pouvoirs prévus aux articles 85, 88, 95 et 96 sont provisoirement exercées par le Président de l’Assemblée Nationale et, en cas d’empêchement de ce dernier, par le 1er Vice-président
Dans tous les cas, il est procédé à de nouvelles élections présidentielles quarante cinq (45) jours au moins et quatre vingt dix (90) jours au plus, après l’ouverture de la vacance.
- « Article 82 : Le Président de l’Assemblée Nationale assurant les fonctions de Président de la République ne peut ni démettre le Gouvernement, ni procéder à la révision de la Constitution, ni dissoudre l’Assemblée Nationale. ».
Beaucoup, à l’instar du Directeur de l’organisme américain National Democratic Institute (NDI), Christopher Fomunyoh, se seraient attendus à ce que la France dont le défunt « Maréchal du Tchad » était le fidèle serviteur commis à la supervision de la base militaire en Afrique du Centre-ouest qu’est le Tchad, suggérât plutôt aux proches de Deby l’application sans faille des dispositions constitutionnelles qui prévalent en de telles occurrences.
Hélas !, la France qui donne par son ponce-pilatisme du crédit aux révélations de Déby qui avait scandalisé plus d’un en affirmant avoir voulu quitter le pouvoir mais avoir été contraint de s’y maintenir par l’Hexagone, a préféré récompenser ceux qu’une certaine opinion l’accuse d’avoir retournés contre son ancien pion devenu verbalement incontrôlable, en les adoubant à la tête d’un pays qui, tant qu’il ne connaitra pas l’avènement d’un régime issu du suffrage populaire donc à même de disposer de la légitimité nécessaire pour réunir ses citoyens autour de l’idéal de réconciliation nationale, continuera d’être cette vaste jungle maudite au carrefour des sous régions Afrique centrale, Afrique de l’Ouest Afrique du Nord, où ne peuvent gouverner que des chefs barbares qui ont brillé par le nombre d’hectolitres de sang versé.
Peut-être est-ce pour perpétuer cette sauvage et sanglante tradition de la dévolution du pouvoir par… la contrainte, la chasse à l’homme, le meurtre qui a cours au Tchad depuis Tombalbaye en 1975 jusqu’à Deby il y a quelques jours, en passant par Malloum en 1979, Goukouni Oueddeye en 1982 et Habré en 1990, qu’Emmanuel Macron a décidé de faire le déplacement du Tchad malgré les menaces très claires du Front pour l’Alternance et la Concorde au Tchad (FACT) à son intention, sous le prétexte des obsèques du “Maréchal du Tchad”, question de faire savoir à la rébellion du FACT dont l’objectif final est l’alternance adossée sur un mode consensuel d’accession au sommet de l’Etat que les choses ne sont pas près de changer.