Cameroun : la capitale économique au rythme des inondations

Les inondations sont fréquentes dans certains quartiers de la ville de Douala, raison des constructions anarchiques et les variations du climat.

C’est le milieu de la nuit à Douala, la plus grande ville portuaire du Cameroun, et les eaux de crue montent rapidement et silencieusement. Alerté par des voisins effrayés, Hummel Tsafack met en toute hâte ses enfants en sécurité et s’empare de quelques biens. Quelques minutes plus tard, les eaux envahissent la maison familiale. Les inondations sont un risque annuel pendant la saison des pluies de juillet à septembre à Makepe-Missoke. Mais, sous l’effet du changement climatique aggravé par l’aménagement urbain et les canalisations bouchées, ces événements sont devenus de plus en plus fréquents.

« La télévision a brûlé, le réfrigérateur a brûlé », se désole Tsafack. Le trentenaire se souvient qu’après la dernière inondation survenue au début du mois « Tout a été saccagé. Dès que nous entendons le tonnerre, nous soulevons les lits. Tout le monde ici a peur. L’eau monte si vite », relate-t-il. « Nous avons déménagé ici parce que c’était moins cher. Nous n’allons pas déménager à nouveau », explique François, un voisin de Tsafack. En effet, bien que le quartier menacé soit situé dans une zone inondable où la construction est officiellement interdite, les gens continuent de s’y installer, poussés par le manque d’espace dans une ville de 3 millions d’habitants dont le taux de croissance démographique est supérieur à 5,5 % par an. L’écart se creuse entre la demande et l’offre de terrains disponibles, alors que près de 110 000 nouveaux arrivants par an cherchent à s’installer à Douala.

Avant même le changement climatique, la ville de Douala était déjà sujette à la montée des eaux. La région du Littoral compte près de 250 kilomètres de voies navigables intérieures et d’abondantes précipitations tropicales qui atteignent en moyenne 4 000 millimètres (157 pouces) par an. La ville se trouve à l’embouchure du fleuve Wouri, sur un bas plateau côtier, et subit l’influence des marées de l’océan Atlantique.

Les données météorologiques des 20 dernières années font état d’une diminution des précipitations, mais cette baisse globale masque une augmentation des phénomènes météorologiques extrêmes tels que les pluies intenses. Selon le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) des Nations unies, les villes côtières sont en première ligne de la crise climatique, menacées par la hausse du niveau des mers et les ondes de tempête.

Selon ce rapport, les inondations déplaceront des millions d’Africains au cours des prochaines décennies et, d’ici à 2050, elles coûteront jusqu’à 60 milliards de dollars (51 milliards d’euros) par an aux 136 plus grandes villes côtières.

Une partie de l’impact des inondations provient également de la gestion de l’environnement. Les berges de la rivière à Makepe-Missoke sont jonchées de déchets plastiques. « Regardez tous les déchets que les gens ici ont jetés », a déclaré le spécialiste de l’environnement Didier Yimkwa. Et de préciser qu’à cela s’ajoute « le limon et la propagation des plantes invasives qui construisent le lit de la rivière. Lorsqu’il y a de fortes pluies, l’eau déborde ». Pour s’attaquer au problème, la ville a construit environ 40 kilomètres de drains depuis 2012 et a amélioré les services de base dans certains quartiers, comme la collecte des déchets. Mais les ordures jonchent partout les quartiers pauvres de Douala et les drains sont souvent obstrués par du plastique.

« On estime que 30% des déchets finissent dans la nature. Nous avons besoin d’un changement sérieux dans l’utilisation des terres lorsqu’il s’agit de fournir des logements aux gens. Cela signifie avoir un centre-ville plus dense et construire des tours d’habitation mais dans certaines zones, les promoteurs immobiliers ont acheté les terrains et ne veulent pas les vendre. », a déclaré Joseph Magloire Olinga, directeur adjoint de la recherche et de la protection de l’environnement de Douala. Il nous revient que les autorités attribuent encore des zones inondables à des projets de construction.

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