Très puissante en Afrique où on lui attribue l’instigation et le financement de coups d’Etats contre des régimes trop regardants à son goût sur leurs affaires pétrolières, ainsi que des guerres civiles à l’instar de celle du Congo-Brazza qui déboucha sur le renversement en 1997 de Pascal Lissouba par Sassou Nguesso présenté comme le protégé de Total), Total n’a pas pu faire le poids mercredi face aux activistes du Mouvement Climat qui se sont mobilisés pour bloquer son Assemblée Générale annuelle qui devait se tenir le 25 mai 2022 à Paris, et exiger de son Président-Directeur Général, Patrick Pouyanné, des engagements concrets et immédiats relativement au retrait de Russie de cette compagnie pétrolière, ainsi que la cessation sans délai de tous ses projets d’énergies fossiles.
250 au total ! C’est le nombre d’hommes et de femmes, venus du Mozambique, de l’Ouganda, de l’Ukraine, de la Pologne…, militants ou sympathisants des organisations écologistes Amis de la Terre, Greenpeace, Alternatiba Paris, ANV-COP 21, qui se sont joints à leurs camarades français afin de faire bloc contre la compagnie pétrolière dont les dirigeants et les actionnaires se réunissaient en Assemblée générale annuelle dans la salle Pleyel à Paris.
Objectif de la mobilisation, rappeler l’urgence d’agir pour cette major mondiale du secteur de l’énergie qui bénéficie de l’appui politico-financier de l’État français (Regarder la vidéo), et dont l’attentisme du passé est pour beaucoup dans le retard pris par la transition énergétique. Et plus encore, la confronter à ses responsabilités au sujet de ses projets à l’étranger considérés comme délétères, voire carrément mortifères.
Criminalité climatique
L’occasion s’est révélée propice pour dénoncer la criminalité dont se rend coupable Total vis-à-vis du climat et mettre en exergue le je-m’en-fichisme de la compagnie française qui ne ferait aucun cas des alertes du GIEC, de l’Agence Internationale de l’Énergie et des Nations Uniesliant la réponse à l’urgence à l’arrêt de tout projet pétrolier et gazier. Selon cette Ong qui indexe Total pour son implication « dans plus de 20 nouveaux projets d’extraction d’énergies fossiles particulièrement émetteurs de gaz à effet de serre » et estime « le prétendu “plan climat” » de Total « absolument incompatible avec l’accord de Paris et la nécessité de limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C »(*), la major est responsable d’impacts climatiques dévastateurs et de violations des droits humains pour les communautés locales » avec le projet EACOP en Ouganda et en Tanzanie et avec le projet Mozambique LNG au Mozambique.
Autre préoccupation et non des moindres, le maintien des activités de Total en Russie qui fait de cette compagnie la seule major européenne à avoir préféré « prendre le risque de financer l’invasion de l’Ukraine et alimenter les crimes de guerre actuellement à l’œuvre plutôt que de renoncer à ses profits mirobolants ».
Au finish, quoique la manifestation contre Total n’ait pas été de l’envergure de celle qui fait reculer un régime, la détermination de ses acteurs et la pertinence de leurs mobiles auront été telles que l’Etat (dans l’Etat français) Total ne pouvait que plier l’échine et renvoyer son assemblée générale qui s’est tenue en distantiel et non plus en présentiel comme initialement prévue au grand bonheur des militants du Mouvement Climat.
Et surtout, comme cela n’a pas échappé à un observateur sur le réseau social Twietter, au grand dam des administrateurs et des actionnaires, privés par la même occasion des gâteries qui vont très souvent avec ce genre de rendez-vous.
Certes, l’Assemblée générale de Total qui s’est tenue à huis-clos et en ligne, a voté quasiment à l’unanimité son plan « climat » qui lui permettra de mener à bien ses « projets d’expansion pétro-gazière », comme l’a souligné Mediapart, mais le contexte dans lequel s’est déroulé ce « vote massif » (une salle d’Assemblée Générale vidée de ses participants), est à lui seul un donner à méditer.
(*) Amis de la terre indique que« près de 80% des investissements de la multinationale française restent alloués aux énergies fossiles, alors que celles-ci sont responsables de 85% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde »