Quatre mois de plus
La décision rendue à l’encontre d’Ousmane Sonko est le dernier rebondissement d’une longue saga judiciaire qu’il a dénoncée comme étant motivée par des considérations politiques – une impasse avec les autorités qui a alimenté les troubles dans ce qui est largement considéré comme l’une des démocraties les plus stables de l’Afrique de l’Ouest.
En mars, M. Sonko a été condamné à deux mois de prison avec sursis dans l’affaire de diffamation impliquant le ministre du tourisme, une décision qui lui permettait encore de se présenter à l’élection présidentielle de février 2024. L’audience d’appel de lundi a prolongé la peine avec sursis à six mois, a déclaré l’avocat Boubacar Cissé, qui représente le ministre.

Ousmane Sonko, inéligible ?
Si Sonko ne réussit pas à contester la nouvelle peine, il sera probablement exclu de la course en vertu du code électoral sur l’éligibilité des candidats, a déclaré Moussa Diaw, maître de conférences en sciences politiques à l’Université Gaston Berger, dans la ville sénégalaise de Saint-Louis.
“Si cette condamnation est définitive, il y a de fortes chances que sa candidature soit irrecevable”, a déclaré M. Diaw. “Cela pourrait sérieusement entacher le dialogue politique”, prévient-il.
Les avocats d’Ousmane Sonko se sont refusés à tout commentaire immédiat. Il dispose de six jours pour interjeter appel auprès de la Cour suprême.
Macky Sall ou Ousmane Sonko?
La peine plus légère prononcée précédemment avait été interprétée comme une tentative des autorités de désamorcer les tensions avec les partisans d’Ousmane Sonko, qui sont descendus à plusieurs reprises dans la rue pour protester. Leur colère est venue s’ajouter au mécontentement croissant que suscite dans certains milieux le fait que le président Macky Sall n’ait pas exclu de briguer un troisième mandat.
La constitution sénégalaise n’autorise que deux mandats, mais certains craignent que M. Sall ne profite d’une récente modification de la constitution pour réinitialiser son mandat, qui s’achève en 2024, ce qui lui permettrait de se présenter à nouveau. Ce qui n’est pas risques selon des observateurs.
Sonko, qui est arrivé troisième aux élections de 2019, a du poids parmi les jeunes sénégalais, dont beaucoup luttent contre le sous-emploi et les mauvaises perspectives économiques. Après la décision de lundi, certains étudiants de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar ont jeté des pierres sur les dizaines de policiers anti-émeutes rassemblés devant le campus, qui ont riposté en tirant des gaz lacrymogènes.
Débordements
Cet accrochage pourrait présager d’autres troubles à venir, car les ennuis judiciaires d’Ousmane Sonko se poursuivent.
Outre cette dernière décision, Ousmane Sonko est également accusé d’avoir violé une employée d’un salon de beauté en 2021 et d’avoir proféré des menaces de mort à son encontre. Il nie toute faute, mais l’issue de cette affaire pourrait également avoir une incidence sur son éligibilité électorale. La prochaine audience est prévue pour le 16 mai.