De la résurgence des tribalismes : De Joseph Owona à Shanda Tonmè.

Existe-t-il un problème Bamiléké au Cameroun ? Les Doualas sont-ils une minorité ethnique ? Existe-t-il une alliance nord-sud dans la conduite des affaires politiques au Cameroun ?

Ces épineuses questions liées à la tribu continuent de se poser avec autant d’acuité –  avec autant de hargne ; ces questions non résolues – ou laissées volontairement en suspend participent d’une manière évidente et indiscutable au pourrissement le climat politique national au point de plonger le pays dans les sanglantes luttes embryonnaires qui, à tout instant peuvent dégénérer et de-là, inscrire le Cameroun qui se veut d’ailleurs une « Afrique à miniature », sur la très humiliante liste des pays à caractères génocidaires à l’instar du Rwanda. Les malheureux évènements d’Akonolinga, D’ébolowa et tout récemment ceux de Deido en sont une illustration parfaite du malaise sociopolitique qui règne au cameroun. Qui entretient cette haine ? Quels sont les heureux bénéficiaires d’une telle démarche ? – d’une telle bêtise humaine ?

Du fondement des Etats et nations

Certains politologues nous diront qu’il n’existe fondamentalement pas de d’état-nations Camerounais puisque la création de ce qu’on peut appeler abusivement « état-nations camerounais » n’est que l’émanation  d’un complot politique colonialiste, orchestrée par les puissances étrangères qui ont tour à tour séjourné au Cameroun, et non de l’émulation volontaire des peuples et des organisation politiques avec pour but ultime, la création d’un environnent politique et social commun ;c’est bien pour cette raison que Marie-louise Eteki Otabela et l’union en Mouvement(UM) appelle sans cesse à une assemblée de peuples.

Mais quand on jette un regard inquisiteur dans les cahiers de l’histoire de la marche du monde on ne peut éviter d’en tirer des leçons et voire même, de se poser une question fondamentale – inhérente à la compréhension des méthodes qui ont participé à la fabrication des états, des nations et état-nations.

L’histoire récente de la fabrication du sud soudan démontre aisément que les peuples ont la capacité à s’autodéterminer et à se choisir un destin politique. Dans le cas du sud soudan, la nation a précédé l’état. Les Sud soudanais dits de « type Africain » (noir de peau) réunis par leur religion chrétienne ou animiste, de leurs langues, de la couleur de leur peau ont d’un commun accord adhéré à l’idée qu’ils avaient un destin commun sur le plan politique et social. On le sait très bien aujourd’hui que les motivations de la scission des état-nations sont généralement d’ordre religieux ou tribal ; le cas de l’ex Yougoslavie est un exemple qui témoigne de cette thèse.

Dans le cas de l’Allemagne c’est plutôt le contraire qui a lieu. Avant de proclamer la république Allemande adossée sur celle de l’état Prusse, Le premier chancelier Allemand Bismarck a dû convaincre les petits états germanophones qu’ils avaient un grand intérêt à cheminer ensemble sur le plan politique et socio-économique (cette idée de Bismarck est contrée après la défaite de l’Allemagne à la guerre de 1918). Certains  état-nations se sont constitués de manière guerrière suite à la conquête des souverains puissants à caractère hégémonique ou même des état-nations déjà constitués par le biais de la colonisation. Un exemple typique est celui des pays de la France d’outre-mer et des pays africains qui dès 1960 acquièrent leurs indépendances.

On n’est pas aujourd’hui capable de dire preuve à l’appuie que la constitution de l’état du Cameroun  est l’œuvre des peuples qui ont y ont toujours vécus d’une part et des colons d’autres part ; le Cameroun n’est pas un cas d’espèce isolé faut très bien le préciser. L’idée dominante qu’on peut tirer du cas camerounais est que l’état-nations s’est constitué progressivement de lui-même dès l’entrée des premiers missionnaires blancs – et par réflexe de défense commun.

Mais quand on voit la configuration même des différents peuples qui constituent les grandes tribus camerounaises, il y a lieu de s’interroger sur la volonté de certains à séparer les peuples frères ; c’est pour cette raison les chercheurs tels le Pr. Mbog  Bassong aujourd’hui et Check Anta Diop hier, pour parler de l’Afrique, préfèrent remonter à l’histoire de l’Égypte pharaonique – c’est pour cette raison que Senfo Tonkam ,Leader estudiantin camerounais très célèbre, s’est éloigné des combats politiques endogènes pour se consacrer à une lutte plus visionnaire et prospective : la lutte globale pour la libération de l’Afrique.

Le problème de sécession que pose les anglophones est lié à divers ordres, le tout dominé par un ressentiment de mise à l’écart systémique. C’est dans ce cas qu’il est évident de constater la frustration propre de la minorité anglophone sur la majorité francophone, due naturellement à l’effet que la majorité induit sur la minorité. Cette frustration n’est pas toujours justifiée au regard en pourcentage au sein des administrations gouvernementales ; les anglophones ont toujours été plus ou moins bien représentés au sein gouvernements successifs depuis 1960.Par contre si l’on regarde avec un regard critique, objectif et analytique les quotas en tribus au sein des administrations et des gouvernements d’Ahidjo à Biya, on peut bien comprendre les frustrations de Shanda Tonmè qui appelle de toute ses forces à une valorisation du culte du mérite et non au culte de la tribu. Les sorties de Shanda sont la conséquence d’une révolte et d’un malaise généralisé de la société camerounaise.

Si les sorties de Shanda ne sont pas diplomatiques ou conforme à la forme, aillons au moins l’honnêteté intellectuelle de lui donner raison quant au fond, puisqu’une bonne partie de l’élite du centre et du nord contrairement aux aspirations des populations majoritairement soucieuses des valeurs démocratiques dans ces régions là ont constitué une alliance nord-sud. Si on procède par répartition proportionnelle des fonctions au sein des administrations et du gouvernement en prenant compte des tribus, il en ressort également un constat clair visant à isoler les Bamilékés et les Bassas d’un état dont il sont membre à part entière, c’est pour cette raison que les chiffres détaillés du dernier chiffres du recensement général des populations a été truqué.

Joseph Owona, Professeur très respecté au sein des facultés de l’ancienne Université de Yaoundé, ne s’inscrivait pas, au vu de ses sorties médiatique à l’époque où il animait le gouvernement du RDPC, dans la logique Shandaenne. Si officiellement ce dernier ne se prononçait pas trop sur les motivations qui l’ont conduits à homologuer une constitution tribaliste comme celle de 1996, il n’en demeure pas moins vrai que celle-ci visait a isoler du pouvoir « la tribus des opposants » qui pourtant n’a pas en son sein depuis l’assassinat sauvage d’Ernest Ouandié et de felix Moumié,ou de Ruben UM des leaders politiques proprement dits. Le dialecticien Mono Ndjana aujourd’hui soigné de la maladie de Schopenhauer qu’il a traîné des années durant ne s’était pas privé sur cette question qu’il avait à tort tant affectionnée par sa théorie sur l’ethnocentrisme. Les élites du Mfoundi, certains chefs Sawas, le député Jean jacques Ekindi ne se sont pas également privées sur cette question qui mine la société camerounaise et freine d’une manière évidente son développement.

 

L’agressivité ou le caractère expansionniste n’est pas l’apanage des hommes d’affaires Bamilékés ; le vérifier est très simple : Donnez Douala en cadeau à Bayero Fadil ou à Kondo Ebellè pour voir s’il diront non. L’ouest Cameroun est l’endroit où on rencontre le plus d’enfants mal vêtus, sales, pauvres, malheureux triant parfois des maladies rares. Les Bamilékés qu’ont dit riches sont incapables d’attirer les investisseurs et les camerounais dans la province où ils sont majoritaires, c’est un fait.





Si la t
héorie Shandaenne a tort sur la forme qu’elle emploie pour formuler ses revendications, elle a en revanche le mérite d’avoir raison sur le fond du constat qu’elle établit par rapport au fait en lui-même, pas par rapport à la tribu. Mais reconnaissons-le ! – la théorie selon laquelle l’économie fût donnée au bamilékés pour freiner leur instinct nationaliste et hégémonique est une pure folie, voire un argumentaire génocidaire. La puissance très relative de ce qu’on peut de manière abusive appeler « puissance économique bamiléké » est un assemblage d’entités et d’individualités. « L’agressivité » des bamilékés sur le plan économique n’est pas une particularité propre à leur tribu ou leur personne. Aliko Dangoté qui fait la fierté de l’Afrique aujourd’hui affirmait en plein jour – lors d’un reportage consacré à sa personne que «  Is true, when i was young, i was very agressive in terms of making money ».

L’agressivité ou le caractère expansionniste n’est pas l’apanage des hommes d’affaires Bamilékés ; le vérifier est très simple : Donnez Douala en cadeau à Bayero Fadil ou à Kondo Ebellè pour voir s’il diront non. L’ouest Cameroun est l’endroit où on rencontre le plus d’enfants mal vêtus, sales, pauvres, malheureux triant parfois des maladies rares. Les Bamilékés qu’ont dit riches sont incapables d’attirer les investisseurs et les camerounais dans la province où ils sont majoritaires, c’est un fait.

Pour nous, il y a pas de problème Bamiléké au Cameroun, mais plutôt une question conjoncturelle bamiléké liée à la politique. Tous les régimes autocratiques s’appuient sur des concepts sales et mesquins pour pérenniser leur règne. Dans le cas du Cameroun, la recette du Bamiléké envahisseur passe, mais jusqu’où  ira-t-elle ? Le concept de minorité Dualas activé par Mouangué Kobila est une erreur grave qui encourage à la paresse et étouffe la créativité. On ne combat pas un destin ni un état d’esprit. Doit-on imposer une politique de quotas sur l’octroie des visas aux ressortissants bamilékés majoritaires à l’étranger ? Les Dualas tout autant majoritaires en Europe ne peuvent-ils pas constituer une force de développement ?

Les majorités d’aujourd’hui seront les minorités de demain, c’est juste une question de temps,bref, si les minorité en font la démarche et montre l’intérêt de vouloir s’épanouir. Pour nous il n’y pas lieu de craindre pour l’avenir du camerounais qui sera radieux dans les années à venir, mais d’abord, il faudra nettoyer au Karcher les écuries d’Augias qui minent sont développement. Ces écuries sont connues.

Alain Florent

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