Le problème Bamileké au Cameroun

Les Bamilékés sont tribalistes et conservateurs. Ils font les affaires entre eux et ne permettent pas à l’argent de sortir de leur cercle. Ils se marient aussi essentiellement entre eux et veulent conquérir le pays tout entier. S’il leur arrivait de prendre le pouvoir un jour, ils le confisqueraient grâce à leur énorme pouvoir financier. C’est en ces quelques phrases que se résume l’essence de que j’appellerai le « problème » Bamiléké au Cameroun.

Masque bamiliekéJe suis certain que beaucoup de personnes ont entendu ou connu une histoire similaire à celle que m’a racontée un de mes amis : Un chef d’entreprise de l’Ouest avait approche un jeune homme  d’origine Bamiléké qui venait de terminer ses études et qui travaillait chez lui. Il lui a dit qu’il avait une offre d’emploi et lui a demande de lui trouver un autre de ses promotionnaires qui soit d’origine Bamiléké. C’est probablement ce genre de situations et attitudes qui ont amène le camerounais à conclure que les Bamilékés sont tribalistes.

Il est aussi dit que les Bamilékés font exclusivement les affaires entre eux. Par exemple, si un businessman d’une autre tribu s’installait dans la province de l’Ouest pour faire des affaires dans un domaine dans lequel des hommes d’affaires Bamilékés ont déjà investi, les populations le feraient échouer en refusant d’acheter chez lui.

S’ils accédaient au pouvoir suprême, pense-t-on, il y a des chances qu’ils cherchent à le conserver, au besoin en utilisant l’avantage que leur confère leur énorme pouvoir financier. Ils auraient « envahi » les terres des autres alors qu’il serait difficile de s’installer à l’Ouest. En effet, des régions entières du Littoral tel le département du Moungo auraient ainsi été « conquises » par les Bamilékés. On leur reproche aussi d’avoir envahi la ville de Douala, d’être très nombreux à Yaoundé et de posséder un quartier dans presque chaque grande ville du pays. C’est ce qu’on assimile à une occupation systématique du territoire.

Ils préfèrent se marier entre eux. Il est d’ailleurs dit que même lorsqu’un homme Bamiléké épouse une femme « nkwa », il finit en général par prendre une femme de chez lui comme 2eme épouse ou alors par abandonner sa première épouse étrangère pour aller prendre une femme de chez lui.

On les accuse de s’être partages des tranches de l’économie et de ne laisser personne d’autre y pénétrer. C’est ainsi que les Batié contrôleraient le textile, Les Bangangtes la pêche, Les Bafoussam et  Mboudas  la quincaillerie et les petits magasins, les Banas l’industrie de transformation et les stations d’essence, les Dschang la technologie et l’ingénierie, les Balenkops,  l’hôtellerie etc.…

Beaucoup de personnes les accusent d’être intéressés dans leurs rapports. Ces personnes disent que lorsqu’un Bamiléké se lie d’amitié avec vous c’est parce qu’il vise un gain matériel ou social au long terme.

Tous ces stigmas ont contribue à créer une méfiance et une hostilité souterraine groupée contre les gens de l’Ouest du Cameroun a qui on a affuble des noms qu’on veut rabaissant ou dégradants de « bosniaques », « grafis », « bamis » etc.….. Cette méfiance est prononcée dans  des tribus telles que les Bassas qui leur reprochent de les avoir trahis pendant la guerre d’indépendance. Ceux-ci se seraient compromis avec les autorités néocoloniales, reconvertis au commerce et auraient racheté les biens du colon-ennemi  alors que les Bassas se battaient encore.

Mais se limiter à ces conclusions, choisir de voir les Bamilékés sous le prisme de ces assertions et surtout baser votre interaction avec eux sur ces stigmas serait traiter ce sujet avec un peu de légèreté.

Allons au delà des stigmas sociaux, voulez vous?

Voici la suite de l’histoire de mon ami : Ce jeune homme Bamiléké a répondu à ce chef d’entreprise qu’il ne connaissait pas d’autre promotionnaire Bamiléké et lui a proposé a la place un autre de ses promotionnaires d’une autre tribu que ce chef d’entreprise a finalement recrute. La vérité c’est que beaucoup de camarades de promotion de ce jeune homme étaient de l’Ouest du Cameroun et qu’il n’aurait eu aucun mal à trouver un des « siens ».

Il n ya pas que les Bamilékés qui soient tribalistes. Les autres tribus sont coupables des mêmes reflexes. Au temps du premier président de la République du Cameroun les gens du Nord du pays et plus récemment les Bétis avaient été accuses, de gérer le pouvoir sur une base tribale. Ce phénomène ne se limite même pas au Cameroun. Au Togo, au Gabon, au Zaïre (République démocratique du Congo) pour ne citer que ces pays-la, les dirigeants ont été accuses de reposer leur pouvoir sur une base tribale. On a aussi constate que la plupart des responsables de notre pays s’entourent de gens de leurs tribus qu’ils transfèrent même souvent d’autres administrations. Je ne suis pas en train de justifier le tribalisme ou de suggérer qu’il soit un phénomène à accepter avec résignation. Je démontre simplement que nous sommes malheureusement tous tribalistes.

Tam tam BamilekéQui ne préférait pas épouser une femme avec laquelle il a des affinités culturelles ? Les Makas, les Bassas, Foulbé, Mafa, Toupouri, Doualas épousent pour la plupart des femmes de leurs tribus. Cela ne devrait même pas être un point de reproche. Nous sommes tous libres d’épouser les femmes que nous voulons pour quelque raison que ce soit. En plus, nous connaissons tous des Bamilékés qui ont épousé des femmes d’autres tribus et qui leur sont restées fideles.

Les Bamilékés font des affaires entre eux la plupart de temps parce que c’est dans leur groupe tribal qu’ils trouvent la plupart des partenaires, des gens intéressés, formés aux affaires et qui prennent l’argent au sérieux. Sur ce point j’aimerais signaler que le Bamiléké trouve que les « Nkwas », comme ils appellent les étrangers ne sont pas sérieux avec l’argent. Le Bamiléké comme tout homme d’affaires se mettrait en relation avec toute personne et dans toute situation légitime qui lui rapporterait de l’argent. C’est-à-dire qu’il ferait des affaires avec un Bakwere ou un Moundang si cela lui rapportait de l’argent. Mais comme les autres, ils préfèrent malheureusement recruter dans leurs entreprises les originaires de l’Ouest.

Ce que les « Nkwa » ne savent pas, c’est que nos compatriotes de l’Ouest se font entre eux les mêmes coups que les autres tribus leur reprochent. Seulement, leur perception (probablement à cause de l’affinité culturelle)   de ces attitudes que nous décrions est différente. Lorsqu’un Bamiléké se fait doubler par un autre, celui-ci le prend comme faisant partie du jeu social.

Savez-vous que les autres Bamilékés reprochent aux Dschang d’être tribalistes et très conservateurs ou que les Bafoussam trouvent que les Bafang sont de méchantes gens? D’autres Bamilékés vous diront que les Mboudas ne font les choses qu’entre eux, que les Bangangtes sont dépensiers et frimeurs, que les Bahams et les Bandjouns ne s’entendent pas et que ce ne serait pas une bonne idée d’épouser une femme de telle ou telle tribu Bamiléké.

Savez-vous que les Bamilékés reprochent à d’autres de ne pas voir d’un bon œil leur progrès et réussite? Ces accusations vous sont-elles familières ? Evidemment, c’est le genre de reproches que nous nous faisons entre nous tout en pensant que le Bamiléké est différent. Ils ont comme les autres personnes des mésententes, des problèmes de jalousies et de compétition. Je ne me réjouis pas  des problèmes de leur communauté. Je veux simplement vous montrer qu’ils sont des êtres humains comme les autres.

Pendant les revendications politiques des années 90, nous avons vu les Bamilékés soutenir successivement l’UNDP,  l’UPC et le SDF qui étaient des partis diriges par des non-Bamilékés. Par contre ceux ayant à leur tête des Bamilékés n’ont jamais vraiment atteint une grande envergure malgré le poids démographique et financier de leur tribu. Calcul et finesse politique ? Soit. Toujours est-il qu’ils avaient soutenu pour la présidence de la République un candidat Mbo, puis un Bassa et enfin un Anglophone dont ils n’étaient pas forcément proches. L’accusation de tribalisme est donc à relativiser

J’ai demande a un pote Bamiléké si c’était vrai qu’il ya des groupes de personnes influentes dans l’Ouest qui aimeraient accéder au pouvoir et le confisquer. Il m’a répondu qu’il y a des individus qui auraient l’intention naturelle d’y accéder. Peut-être même qu’il y aurait (cela est mon analyse pas celle de mon pote) un groupe de conservateurs a l’Ouest qui lorgneraient avec envie le fauteuil présidentiel, mais l’avis général des Bamilékés est que se mêler de la politique a le potentiel de leur attirer des ennuis. Ils ont toujours considéré l’administration camerounaise comme hostile a leur tribu. C’est cette hostilité de l’administration qui a pousse beaucoup d’entre eux à adopter des professions libérales et d’éviter les fonctions d’autorité.

Même s’il est vrai que les Bamilékés aimeraient que l’un d’entre eux accède au pouvoir, ou est le mal a cela ? Ne sont-ils pas Camerounais? Ne devaient-ils pas avoir les mêmes droits que les autres ? Les anglophones pensent bien qu’il est temps que l’un des leurs accède au pouvoir après 50 ans de règne francophone. Les gens du Nord aimeraient bien qu’on le leur retourne et les Côtiers croient bien être ceux qui soient bien places pour départager ces autres groupes puissants. Pour finir, quel groupe social, culturel, politique ou tribal n’aimerait pas conserver le pouvoir après l’avoir acquis ?

Supposons même que les Bamilékés aient un plan pour occuper systématiquement le territoire et conquérir tout le Cameroun, croyez-vous que ce soit en les isolant qu’on les en empêchera ? Vous serez surpris d’apprendre que beaucoup d’entre eux ne sont pas au courant de pareille stratégie et n’y adhéreront même pas. Ceux-là veulent être comme tous les camerounais, avoir des amis de toutes les tribus, être acceptes partout ou ils vont dans le triangle national sans être vus comme des occupants et des conquérants.

Permettez-moi une parenthèse pour vous raconter cette anecdote. Lorsque j’étais encore à l’école et qu’avec mes camarades, nous rentrions chez nous après de longues heures d’études, nous nous arrêtions souvent sur le chemin pour acheter à manger. N’ayant pas suffisamment d’argent, nous disons aux vendeuses que nous ne pouvions pas vraiment payer pour ce dont nous avions besoin. Et vous savez ce que ces femmes Bamilékés nous disaient ? « Vous êtes mes enfants et je suis une mère et je ne peux laisser des enfants aller au lit affames. Dites-moi ce que vous voulez ».Voila ce qu’elles nous disaient sans chercher à savoir de quelle tribu nous étions.

Masque bamilekéFermons la parenthèse et poussons le raisonnement à l’ extrême. Supposons même que les Bamilékés contrôlent une plus grande partie de l’économie et qu’un d’entre eux accède au pouvoir suprême. Pensez-vous qu’ils viendront vous déposséder de vos biens ? Vous chasseront-ils du Cameroun ? Serez-vous moins bien lotis que maintenant sous domination économique, financière et militaire de la France ? Pensez-vous que votre situation avec la « clé-14 »du FMI et la Banque Mondiale soit meilleure que sous une « domination » Bamiléké? Réfléchissez un peu. N’avez-vous pas tous sinon des amis, du moins une connaissance Bamiléké ? Croyez-vous que votre ami ou voisin vous marchera dessus juste parce que le climat politique aura change en sa faveur ?

Je sais que je ne dirais pas assez pour dissiper le malaise que semble poser la question Bamiléké dans la société camerounaise. En effet, quel que soit ce que je dis, il n’en reste pas que ces accusations ne sont pas gratuites. Elles sont fondées sur des expériences réelles. Les Bamilékés sont un peu ce qu’on leur reproche, il est vrai pas tous,  et de moins en moins avec la nouvelle génération. Mais, si nous changions notre façon d’aborder le problème et essayions de les comprendre ?

Essayer d’expliquer l’homme de l’ouest

Le Bamiléké est issu d’une région petite (par rapport a la densité de la population) et pauvre en ressources naturelles bien que jolie et d’un climat agréable, Il n ya pas de pétrole ou d’or a l’Ouest. Le terrain n’y est pas très favorable à l’agriculture. Le gibier n’y existe pas, la pêche n’y constitue pas une activité viable et il n ya pas beaucoup d’arbres fruitiers. Cet environnement naturel difficile dispose déjà le ressortissant de l’Ouest à une grande combativité mais aussi a un esprit de solidarité communautaire remarquable. Ne dit-on pas que la difficulté renforce les liens humains ?

A cela s’ajoute le fait qu’il est issu d’une culture forte,  conservatrice et polygamique. La plupart d’entre eux viennent de familles avec de nombreux enfants. Tout de suite le jeune Bamiléké comprend qu’il devra compter sur lui-même et sa mère pour réussir dans la vie. Il saisit aussi très vite que la terre sur laquelle sa famille vit et l’héritage de son père ne seront pas suffisants pour lui et tous ses frères et sœurs. Il s’impose tout de suite à lui que le moyen de s’en sortir est d’aller se battre ailleurs. Des le bas âge  il développe en lui des reflexes de survie et un caractère d’endurance. C’est donc équipé de ce potentiel qu’il quitte sa terre et va à la recherche d’un environnement meilleur. 

Il agrandit son territoire en achetant d’abord les terres  de ses voisins puis des terres lointaines. Qu’auriez-vous fait à leur place ? Seriez-vous reste confines a un endroit étroit alors qu’il ya des opportunités ailleurs ? N’est ce pas ce que nous faisons nous-mêmes en allant à l’étranger chercher un meilleur avenir ? En plus, la loi permet a tout citoyen de s’installer la ou il veut tant qu’il respecte les règles de la société.

Ces dispositions d’esprit rendent l’homme de l’Ouest capable de voir des opportunités la ou les autres n’en voient pas et de saisir des occasions que les autres négligent. La combativité acquise dans un environnement d’adversité le rend compétitif et travailleur plus que ceux qui ont connu un environnement plus confortable. Ce n’est pas qu’il soit forcément plus intelligent que les autres, il est beaucoup plus travailleur. Ne nous moquons-nous pas souvent d’eux lorsqu’ils acceptent des métiers que nous trouvons rabaissant ? Ils ne commencent pas souvent par des quincailleries et les compagnies de transport. Leurs affaires commencent par le petit commerce, la vente de la ferraille, de la friperie, la conduite du taxi,  la vente des pneus d’occasion. Les grands magasins, les hôtels, les compagnies de taxis et les boucheries viennent après.

Ils réussissent dans les affaires parce que les débuts humbles leur apprennent la discipline, le respect de l’argent et leur confèrent la connaissance de tous les recoins du business dans lequel ils se lancent. C’est cet apprentissage pénible qui développe l’habileté nécessaire a la réussite des affaires. Ce n’est que lorsqu’on a gagne le million soi-même qu’on peut le garder. Et cela explique bien les échecs des gens à qui on a remis de l’argent sans effort pour ouvrir une affaire. Sans connaissance véritable de l’activité dans laquelle ils se lancent, sans esprit d’endurance et  sans discipline, ils finissent par échouer.

C’est le reflexe de survie et cette initiation au commerce qui rend les Bamilékés si sérieux avec l’argent et si attaches a celui-ci. On trouve  le même comportement dans les groupes culturels ayant évolué dans la même adversité. Si vous observez les chinois, vous vous rendrez compte qu’ils ont de grandes similitudes avec nos frères de l’Ouest. Ils ont la même endurance, la même solidarité et le même sens pour le commerce

Voila en partie pourquoi peu de non-Bamilékés s’installent a l’Ouest pour y faire des affaires. Peu de gens trouvent suffisamment de motivation pour aller s’installer sur un territoire densément peuple et competir avec des commerçants-nés. Même s’il ya  d’autres groupes culturels (des Bororos, d’autres Nordistes, des Bétis, des Bassas etc..), la plupart des non-bamilékés qui vivent a l’Ouest travaillent pour des compagnies ou sont des fonctionnaires.

C’est la force de leur culture et leur attachement a leurs valeurs qui expliquent en partie leur renfermement sur eux-mêmes.

Contenir ou embrasser?

J’ai déjà été victime d’un acte de tribalisme criard de la part d’un Bamiléké. J’ai aussi été emballe dans une relation intéressée et calculée d’un Bamiléké. Je le dis juste pour le cas ou vous penseriez que je sois naïf ou que je ne les connaisse pas bien. Au contraire j’ai été dans des écoles ou beaucoup de personnes étaient Bamilékés. J’ai opéré dans leurs groupes, assiste a leurs funérailles et  autres cérémonies. J’ai vécu dans leurs villes et visite leurs villages. J’en connu de façon intime dans la vie sociale. J’ai été lie a eux et le suis a nouveau par des liens de mariage. Non, je ne suis pas marie a une femme Bamiléké dans le cas ou vous croyez que c’est l’amour pour ma femme qui m’influence. Vous voyez, J’ai personnellement connu un aspect de certains d’entre eux dont les autres tribus se plaignent.
 
Mais j’ai aussi été bénéficiaire d’acte de générosité, de fidélité, de confiance de la part d’eux.
Dans toutes les situations ou j’ai vécu le tribalisme directement ou non, j’ai rencontre des Bamilékés qui l’ont condamne et dénoncé. J’ai de véritables frères et sœurs originaires de l’Ouest, des gens qui s’ouvrent librement à moi et à qui je me confie facilement. Nous sommes plus proches les uns des autres que de certains membres de nos tribus respectives. Et mon expérience n’est pas unique. Je connais d’autres gens ayant les mêmes rapports avec des gens de l’Ouest.

Alors faut-il essayer de les contenir et se méfier d’eux comme cela se fait ou les embrasser et les intégrer ? L’homme de la rue non-Bamiléké, bien qu’ayant des relations avec les Bamilékés voit dans leur groupe un danger si grand qu’il pense qu’il faille les contenir, limiter leur expansion pour les empêcher de « phagocyter » les autres. Il est même dit que les administrations qui se sont succédé au Cameroun auraient développé une politique de « containment » vis-à-vis des Bamilékés. Ceux-ci auraient le droit de faire les affaires mais ne devraient pas se mêler de la politique. Le pouvoir économique et financier aux mains d’un seul groupe culturel mettrait en danger les autres tribus, pense-t-on.

Vous pouvez déjà imaginer ma réponse. Non, je ne pense pas que la politique du containment soit la réponse appropriée. D’abord parce qu’elle n’est pas juste. On ne peut pas sanctionner un groupe parce qu’il réussit dans un domaine car il faut le dire,  les Bamilékés semblent poser un problème en réalité a cause de leur succès économique. S’ils étaient un groupe sans succès ou insignifiant ils ne feraient pas  peur.

Ensuite, la marginalisation ne marche même pas, tout au moins sur le plan économique. Ils continuent d’acheter et d’agrandir leur patrimoine économique et financier. Ils sont toujours le groupe culturel le plus riche et probablement le plus répandu sur le territoire national. On ne peut pas contenir le dynamisme. Et la politique du containment va a l’encontre de la notion d’excellence que le Cameroun doit absolument cultiver pour se développer et faire compétition avec les autres nations

La seule façon de désamorcer cette situation est de les accepter et les intégrer. C’est aussi ce qui me parait la bonne chose à faire. Les Bamilékés sont une force dont le Cameroun a besoin. Ils sont très nationalistes et très proches de leurs pays. Ils bâtissent rarement des richesses durables en territoire étranger ou loin de leurs terres. Ils finissent toujours par revenir et ramener leurs biens chez eux, c’est-à-dire chez nous.

Ils sont à l’avant-garde du combat pour une véritable indépendance du Cameroun. Ils sont en réalité le facteur qui nous permettra de contrer les entités prédatrices étrangères qui dévorent notre économie et de reprendre le contrôle de notre destin. Il n y aura pas de véritable développement au Cameroun tant qu’on n’aborde pas la question Bamiléké autrement, tant qu’on n’intègre pas leur dynamisme comme facteur de développement national. Essayer de contenir le dynamisme Bamiléké joue au long-terme contre le Cameroun.

Les hommes d’affaire Bamilékés et d’autres camerounais en se mettant ensemble au besoin, auraient pu racheter les sociétés d’Etat privatisées. Oui, cela leur aurait conféré un pouvoir économique énorme, mais la richesse serait restée  au pays. Elle ne serait pas allée en France ou aux Etats-Unis. Oui, cet argent serait allé dans leurs comptes bancaires, mais dans des banques installées au Cameroun. Les hôtels construits a Douala ou a Yaoundé ne seront pas rebattis a Mbouda ou a Bangangte. Même s’ils l’étaient, ces villes ne font-elles pas partie du Cameroun ?  Quand des habitations sont construites par des Bamilékés à Edéa ou à Ebolowa, n’y restent-elles pas ? Enfin, on aurait toujours pu et pouvons toujours mettre sur pied des lois pour protéger les faibles et les démunis (parmi lesquels on compte les Bamilékés) contre les excès de ceux qui ont le pouvoir financier.

Savez-vous que les Bamilékés restent dans leurs cercles culturels parce qu’ils se sentent mal-aimés et même rejettes des autres tribus ? Je n’insinue pas qu’ils soient dans le désir brulant d’être aimes. Ce que je dis, c’est qu’ils aimeraient être perçus autrement, être acceptes. Certaines de leurs attitudes de renfermement et d’exclusivité tribale s’expliquent par ce sentiment d’être marginalises.

Au lieu d’avoir peur d’eux, on devrait aller vers eux, et de façon tout à fait naturelle, les supposes groupes de conservateurs et les poches de tribalisme se détruiront ou tout au moins seront isolés et  neutralisés. Le but n’est pas de détruire leur cohésion sociale, c’est de les aider à se débarrasser des éléments qui en leur milieu interfèrent avec leur intégration totale.

Nous avons beaucoup à apprendre de leur dynamisme et réussite dans les affaires, de leur sens de l’organisation et de leur discipline. On devrait chercher à étudier ce qui fait la cohésion de leurs groupes et à comprendre comment ils ont pu faire de leur province la plus urbanisée du pays. Au-lieu de nous méfier d’eux, travaillons pour devenir aussi endurants, disciplines et donc compétitifs qu’eux. Intégrons leurs milieux, demandons-leur des conseils, établissez des relations d’affaires avec eux ou requerrez leur assistance pour commencer une affaire. Faites-le et vous serez surpris de voir a quel point ils sont disposes à aider. Imaginez seulement comment le Cameroun serait prospère si tous les Camerounais gêneraient autant d’argent qu’eux!

Ne vous basez pas sur ce que vos proches ou parents disent d’eux. Parlez-leur vous-mêmes et n’hésitez pas à leur exprimer vos appréhensions sur ce qu’on dit d’eux. Posez-leur des questions et vous verrez avec quel facilite ils en parlent. Ils n’attendent que cela. Vous vous rendrez aussi compte que beaucoup de choses que vous croyiez ne sont pas vraies.

Ils sont des êtres humains comme les autres, bâtis de faiblesses et de forces, ayant des sentiments et des passions, capables d’aimer ou d’abhorrer. Comme tous les êtres humains, ils peuvent être conquis par l’amour, le respect et la bienveillance. Ils sont exactement comme vous et moi. Cela veut aussi dire que toutes les autres tribus ont bien des aspects de leur culture qu’on leur reproche ! Il y aurait bien de choses à dire sur les Bafias, les Banens, les Manguissas ou les Bororos. Nous devons tous nous accepter et trouver le moyen de vivre avec nos différences. C’est bien ce que nous faisons en famille. Et les Bamilékés sont nos frères et sœurs.
 
Le problème de tribalisme est en fin de compte lie à la nature humaine. Il n’est qu’une autre forme de discrimination a cote de la discrimination raciale, religieuse, spirituelle, économique. Il n ya pas de problème Bamiléké. Il n y a qu’un problème humain. La peur, l’égoïsme, l’insécurité et l’ignorance surtout, sont nos véritables problèmes. Si on enlève les Bamilékés du Cameroun, nous trouverons un problème avec une autre tribu, peut-être les Bétis. Et si on enlevait toutes les tribus au Cameroun en dehors des Bétis, ceux-ci auront probablement un problème avec les Bulus. Vous voyez, le problème est dans le cœur.

En fin de compte, nous n’avons même pas d’autre choix que de nous associer à eux. Nous partageons la même terre, le même pays, les mêmes adversités et le même destin. Nous ne pouvons pas chasser les Bamilékés du Cameroun, ni vraiment les contenir. Ils sont Camerounais et n’iront nulle part. Pourquoi alors ne pas simplement les accepter ? Cela est bien plus facile que de se méfier d’eux. Nous sommes un seul peuple et ne pouvons réussir que dans une ambiance d’unité nationale, de cohésion culturelle et de paix sociale.

Ce que vous devez faire

Le gouvernement devrait être à l’avant-garde du combat contre ce sentiment anti-Bamiléké. Il devrait aider à détruire ces stigmas sociaux et psychologiques. Pourquoi ? Parce qu’il est garant de la cohésion sociale. Comme un père qui garde l’harmonie dans sa maison, notre gouvernement doit sincèrement œuvrer pour la paix sociale et prêcher par l’exemple. La pratique qui consiste à envoyer des fonctionnaires servir dans des régions dont ils ne sont pas originaires est un pas dans ce sens. Mais il faut faire plus.

Le gouvernement devrait encourager des échanges intertribaux, créer des forums dans lesquels les gens tout en exprimant leurs frustrations et rancœurs donneront la voie a la réconciliation et a la cicatrisation. Il ya beaucoup de perceptions qui sont dues a des malentendus et a l’ignorance. Parler aidera à chasser les démons de la division, même s’il pourrait au passage occasionner quelques passions. Il ne sert à rien d’ignorer ces frictions sociales ou de prétendre qu’elles n’existent pas. Les aborder ne détruira pas le tissu social. Au contraire, il aidera à construire la nation.

Il faudrait faire des documentaires culturels pour expliquer certaines tribus aux autres. Il faut enseigner aux élèves les cultures de leurs pays et leur véritable histoire. Il faut amener le jeune camerounais du Littoral à s’identifier plus à son frère Bamoun qu’a un parisien ou londonien. Il faut encourager par un système de récompense les camerounais a sortir de leur milieu culturel pour aller vivre et faire des études dans d’autres milieux.

Ca, c’est le rôle du politique sur lequel nous n’avons pas de contrôle ou de pouvoir. Mais nous pouvons déjà au niveau individuel faire quelque chose. Choisissez de pardonner tous les torts que vous auraient faits les membres d’autres tribus. Encouragez vos enfants à aller faire des études à l’Ouest. Ils y apprendront beaucoup et y acquerraient des qualités qui leur serviront dans leur vie sociale et professionnelle.

Puisque la discrimination est une disposition naturelle à aider ce qu’on aime, prenons tous la décision de cultiver une relation et même de créer une veritable amitié avec une personne d’une tribu différente. Recrutons comme adjoint ou assistant une personne d’une tribu autre que la notre. Promettons-nous d’aider cette personne sur le plan professionnel et de contribuer à son succès. Et nous savons tous qu’on se fait un ami en en devenant d’abord un. A quoi cela servira-t-il ? Déjà à briser la perception que cette personne aura de votre tribu. Ensuite cela contribuera a l’intégration culturelle et finalement, vous aidera à vous sentir bien car vous aurez contribue a la construction du Cameroun de demain.

Nous avons besoin d’un espace de dialogue et de réconciliation dans notre pays. Pas seulement d’une reconnexion entre les Bamilékés et les Bassas, mais aussi entre Bamilékés et Bétis, Bétis et leurs frères du Nord-Cameroun, Francophones-anglophones, le grand Nord et le grand Sud, pouvoir et opposition, ère Ahidjo et ère-Biya, régime Ahidjo et le groupe représentant les nationalistes assassines. Cela est faisable car au plus profond de lui, ce que l’être humain désire le plus, c’est de vivre en paix et être aime Et cette réconciliation est la première étape au véritable développement de notre pays.

Atangana Mebah Dorien

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