Voici ce que les occidentaux n’ont pas compris de l’économie moderne

Leçon de géostratégie africaine No 24

Le Dumping Social, la sous-évaluation de la monnaie chinoise, le Yuan, la concurrence déloyale etc. Voilà quelques-uns des florilèges d’accusations que font pleuvoir sur la Chine la majorité des économistes et politiciens occidentaux. Et si ce beau petit monde était à côté de la plaque ?

La croissance de la Chine et son positionnement stratégique au rang de la première puissance mondiale montante a fait naître un désarroi sans précédent chez les anciens puissants d’hier et la conséquente navigation a vu chez les économistes et politiciens occidentaux qui étaient incontestablement il y a peu de temps les références pour un modèle économique réussi, qui semblait indétrônable. Avec la Chine qui a imposé un nouveau modèle économique, le désarroi est total, et 10 ans après, la boussole leur semble toujours introuvable pour mieux orienter les idées et comprendre de quel côté se trouve le Nord au XXIème, c’est-à-dire à l’Est

Et si la compétivité avait pris un nouveau visage

Comme il est déconcertant de voir des économistes occidentaux s’accrocher à des considérations puériles pour expliquer leur manque de compétitivité vis-à-vis de la Chine et le conséquent désert industriel qui semble avoir stablement élu domicile en Occident, en invoquant tous les bas salaires pratiqués en Chine, ce qui est faux.
Ceci est faux parce qu’en matière de salaires, ils sont deux fois plus bas en Afrique et en Amérique du Sud qu’en Chine, sans que ces deux régions attirent les mêmes investissements. Les vraies raisons sont ailleurs :

Jintao1- Il existe en Chine un état fort qui est présent dans presque tout le processus économique avec un objectif bien précis et bien visible, celui de sortir des millions de chinois de la misère.

2- Dans la formation du coût d’un produit, la main d’œuvre compte pour environ de 2 à 4 %, pire, à 10%. Il est donc absurde qu’en Occident, on utilise la question des salaires prétendument élevés pour justifier la non compétitivité des entreprises. Si un producteur Italien met un article sur le marché à 100 € alors que son concurrent chinois est capable de l’offrir à 25 €, la différence de 200% ne peut nullement être justifiée par les 10% de coût de l’emploi.

Même si on avait offert le coût des salaires gratuitement au producteur européen, il resterait toujours une différence de 190% à couvrir et c’est peut-être en se concentrant sur cette valeur que l’Occident peut avoir un début de solution à sa crise qui n’est qu’au début, malheureusement. Il s’agit notamment des coûts liés à l’architecture industrielle elle-même du pays de l’acquisition des matières premières à la qualité de la formation professionnelle et au type de la logistique pour toucher le client du bout du monde et que nous allons étudier ci-dessous.

3- Les matières premières achetées par l’Etat.

Contrairement à l’Occident où chaque industriel doit se débrouiller tout seul pour trouver les intrants dans le monde entier, la Chine utilise d’autres méthodes: il existe des mastodontes d’états qui se chargent de grouper ses achats et donc, réussit à décrocher les meilleures conditions d’achat qu’un privé Occidental ferait rarement, ou grâce à une guerre humanitaire.

4- Produits semi-finis par l’Etat.

Contrairement à l’Occident où une industrie par exemple d’automobiles s’installe et se fournit chez des sous-traitants, en Chine, c’est l’Etat qui produit l’essentiel et le fabriquant de bicyclettes se développe en achetant les pièces fournies par l’Etat. C’est le cas chez les fabricants de climatiseurs, et bien d’autres secteurs clés, là où le fabriquant italien doit se débrouiller tout seul pour assurer sa production de A à Z, très souvent, son concurrent chinois qu’il doit affronter sur le marché, n’a eu qu’à traiter la partie de S à Z, très souvent de l’assemblage et la vente. Or, le prix des pièces qu’il assemble, non seulement proviennent de l’Etat qui veut des devises et qui ne vend pas mais cède pour créer des emplois et stimuler son économie.

5- Pour les chinois, l’énergie ne se vend pas

En termes de capitalisation boursière, selon les informations fournies par Fortune Global 500 pour l’année 2010, sur les 7 plus grandes sociétés du monde, 6 sont des sociétés qui s’occupent d’énergie dont une américaine, une Britannique, une hollandaise et 3 chinoises. Mais le plus intéressant est de constater une fracture entre les entreprises occidentales et chinoises sur les bénéfices réalisées qui sont plus forts chez les premiers. Par exemple, la Shell avec 97.000 employés, réalise 20,116 milliards de $ de bénéfice, la Exxon Mobile avec 103.000 employés a réalisé un bénéfice net de 30,40 milliards de $, alors que les chinoises semblent à la traîne : la Sinopec avec 640.000 employés ne réalise que 7,63 milliards $ de profits alors que sa consœur la China National Petroleum, avec 1.500.000 employés a réalisé à peine 14,37 milliards de $ de profit.

Selon les évaluations classiques en Occident, Shell et Exxon sont à féliciter parce qu’elles ont fait du bon travail. Mais selon la vision pragmatique des chinois, le montant élevé de leurs profits est un indicateur du niveau du frein à la compétitivité d’une nation. Pour la Chine, la compétitivité de ses entreprises commence avec le coût de l’énergie. Les entreprises du secteur ne doivent réaliser des bénéfices que pour leur propre développement pour la recherche et les besoins d’exploration de nouveaux gisements, alors qu’en Occident, les bénéfices colossaux font le bonheur des actionnaires qui iront ainsi figurer sur la liste des individus les plus riches du monde.

Cette différente conception du monde de l’économie a été encore plus criante en 2008, lorsqu’en pleine crise économique, avec la volée des prix du pétrole brut sur les marchés, toutes les entreprises pétrolières de l’Occident annoncent des bénéfices historiquement élevés. La Exxon Mobil par exemple annonce les bénéfices de 45 milliards de dollars en hausse de 11% par rapport à 2007 ; en France, Total annonce les bénéfices de 22 milliards de dollars (17 milliards d’Euros) alors que pour la même année, leur concurrente chinoise, Petrochina, la première en terme de quantité du pétrole produit perd de l’argent parce qu’une décision politique très intelligente (à mon avis) prise par le gouvernement de Pékin sur le gel des prix du carburant porte à une chute drastique de 22% des résultats nets, pour permettre aux entreprises chinoises de rester toujours les plus compétitives du monde.

Il est évident que tous les produits dérivés du pétrole en plastique comme les jouets, les accessoires pour voitures, emballages etc. proviennent à 90% de la Chine, ce n’est pas parce là-bas la main d’œuvre coûte moins cher. C’est tout simplement parce que l’état a placé le vrai bénéfice à la fin de la chaîne en terme d’emplois crées, de devises étrangères accumulées, d’excédents de la balance commerciale et non pas spéculer de façon idiote sur tout ce qui bouge, allant même jusqu’à l’auto-flagellation (se donner des coups à soi-même) comme c’est le cas en Occident. En Chine, il existe un objectif clair, c’est celui de la redistribution des richesses créées qui doivent se traduire en termes de millions de personnes qu’on réussit à sortir de la misère et non la célébration de la gloire de voir des noms de quelques milliardaires dans le classement annuel de Forbes.

Sur le plan des produits pétroliers, en Europe, les gouvernants semblent vouloir le beurre et l’argent du beurre à la fois. On veut la compétitivité des entreprises, mais en même temps, on taxe jusqu’à 77% les produits énergétiques qui entrent pour près de 40% dans la formation du coût d’un produit fini, transporté, livré à la boutique et même le coût du déplacement de l’acheteur pour venir le prendre peut être pris en considération.

EDFCe qu’on vient de voir pour le pétrole est identique sinon pire dans le secteur de l’électricité qui en Chine est presque gratuite. La même année 2010, la première société d’électricité au monde, State Grid corporation de Pékin, avec 1.564.000 employés et ses centaines de millions d’abonnés, ne réalise que 4,56 milliards de dollars US de bénéfice, c’est-à-dire moins des 5 milliards de dollars d’EDF (Électricité De France) un an plus tôt, en 2009 (avant sa chute de 74% en 2010 à cause des déboires sur les marchés étrangers) et avec ses 158.000 employés, c’est-à-dire, 10 fois moins que son concurrent chinois et 20 fois moins d’abonnés. La vérité est que pour Edf, entreprise publique, les abonnés sont des pigeons qu’il faut plumer avec des augmentations à chaque début d’année sous des prétextes les plus variés, comme l’homologation au prix du pétrole, lorsque ce dernier monte.

La logistique comme instrument de puissance géostratégique

La Chine a des mastodontes de mer qui pratiquent très souvent des prix politiques. Ce n’est nullement du dumping, mais les opérateurs sont juste facturés au prix coûtant. Un exemple est la COSCO (China Ocean Shipping Company), propriétaire de 201 bateaux porte-conteneurs soit 900.000 EVP (Equivalent Vingt Pieds, taille moyenne d’un conteneur) permet aux transitaires de facturer un conteneur 20-40 pieds de la Chine pour livraison à n’importe quel port en Europe pour des prix incroyablement bas, en fonction des objectifs que l’Etat chinois veut atteindre en terme d’exportation ;

C’est-à-dire que parce que COSCO est une entreprise publique qui ne recherche pas le bénéfice pour elle-même, mais le bénéfice pour la nation chinoise, elle est un instrument très puissant de géostratégie, qui participe à l’objectif de conquérir, tous les marchés potentiels. Elle rapproche les côtes chinoises des côtes du monde entier. On arrive ainsi au paradoxe que le coût de transport terrestre à l’intérieur de la même Europe va souvent jusqu’à 4 fois plus cher que le coût du transport maritime de 30 jours de mer de la Chine jusqu’en Europe. Et lorsqu’on sait que 75% des échanges en Europe se font entre pays Européens eux-mêmes, on peut aisément imaginer toute l’aubaine que cela représente pour la Chine dans les années à venir, si rien n’est fait par les économistes européens pour trouver une solution à long terme.

Le 7 Juin 2010, c’est ce même Cosco qui a acheté pour 1,90 milliards de yuan, les lots mis en vente par la municipalité de Shanghai, c’est-à-dire que pour ce que deviendra dans les 10 ans à venir le premier centre financier du monde, l’immobilier est encore une fois sous le contrôle de l’état chinois. En effet, sur les 11 lots mis en vente, 9 ont été achetés aux enchères par les entreprises publiques et seulement 2 aux privés chinois.

Cosco est à l’image de la polyvalence des géants publiques chinois, contrôlant tout ou presque dans son secteur, de la gestion des ports (3,4 milliards de dollars pour la concession de la gestion de conteneurs dans le port de Pirée en Grèce en 2008.) à l’immobilier en passant par la construction des bateaux et la fabrication des conteneurs. Ce qui lui donne un avantage inouï au service de la compétitivité des entreprises chinoises sur toutes leurs concurrentes qui selon le modèle de développement du capitalisme occidental, pêchent par une trop grande spécialisation dit-on pour réaliser le maximum de profit.

Par exemple, sa succursale française COSCO FRANCE dont le siège est à Paris est présente dans toutes les villes portuaires françaises et travaille surtout comme une société commissionnaire de transport, agissant dans le domaine de la consignation, la réparation de navires, mais aussi, le fret aérien, avec le même objectif que le produit sorti de l’usine chinoise doit arriver n’importe où sans souffrir d’une quelconque pénalisation liée au transport ou à la logistique.

Airbus A320En Juin 2011, 52 Avions Airbus A320 sont sortis de la nouvelle usine de Tianjin en Chine. Là encore c’est Cosco qui est devenu incontournable au titre d’entrepreneur général des programmes de la société Airbus de Tianjin, et chargé du transport des grosses pièces de l’Europe à Tianjin, notamment le transport par péniche, le transport intérieur et le transport océanique par conteneur dans la section européenne, ainsi que le transport intérieur et le transport aérien à la section de Tianjin.

Ici aussi, le choix d’une société publique chinoise n’est pas un hasard, mais c’est le résultat d’une décision géostratégique bien pensée. C’est en effet Cosco qui est choisi pour mener bientôt la même opération mais en sens contraire de la Chine vers l’Afrique, pour l’assemblage de l’avion chinois dénommé XIAN MA-60 sur lequel la Chine a fait un pari pour remplacer les mauvaises habitudes africaines de n’acheter que les vieux avions en Occident paradoxalement plus coûteux (que le neuf chinois), et qui se révèlent de vrais cercueils volants au-dessus du continent africain.

La Xia MA-60 équipe déjà les compagnies : Air Zimbabwe, Air Burkina, Air Burundi, South African Express, British Caledonian, Laos Airlines, Sri Lanka Air-Force, mais aussi, selon le quotidien chinois People Daily du 25 Mai 2011, les compagnies de plusieurs autres pays en Asie, en Afrique et en Amérique du Sud et sont en service sur une centaine de lignes aériennes. Selon les indiscrétions à Pékin, Cosco effectuera bientôt le même transport des parties d’avions des côtes chinoises vers les côtes africaines, dans la ville portuaires de Kribi au Cameroun où un port en eau profonde est en construction pour accueillir ce genre de bateau. Lorsque la société EADS (Airbus) s’est installée en Chine, elle l’y était contrainte, comme condition posée par la Chine à l’achat d’un nombre important de ses avions.

Mais lorsque la Chine prévoit de construire ses avions destinés à l’Afrique directement sur le sol africain, ses économistes et stratèges démontrent d’avoir compris ce que les économistes occidentaux peinent encore à comprendre et c’est que : dans l’économie moderne, vous ne pouvez pas vous obstiner à être prospère tout seul et que pendant que tout va à merveille, c’est le bon moment pour aider à se renforcer de nouveaux partenaires à être là pour vous aider lorsque les moments difficiles arriveront, parce que vous leur aurez donné les moyens et la possibilité d’être cette porte de recours, cette issue de secours.

La faiblesse démocratique

Si la démocratie du suffrage universel était quelque chose de si merveilleux, nul doute que l’Occident préférait la conserver et même la cacher comme un secret militaire, afin de l’utiliser comme avantage sur les autres peuples de la planète. Si la démocratie du suffrage universel pouvait permettre le développement d’une nation, il est parfaitement évident que l’Occident ne serait pas si engagé à financer des oppositions créées ad-hoc pour tel ou tel autre pays, pour les aider à devenir de dangereux concurrents sur le plan de la production industrielle, sur le plan de la production intellectuelle. La vérité est toute autre et bien plus amère. C’est que l’Occident a compris que l’une des raisons de son déclin est bien la démocratie du suffrage universel qui a porté au pouvoir les personnalités les plus médiocres, à condition qu’elles soient soutenues par les puissances de l’argent qui sont rarement là pour l’intérêt général.

La médiocrité des hommes politique s’est accompagnée des économistes piégés par la prétendue supériorité sans faille de l’ultra-libéralisme. On a ainsi vu des économistes de renom en Espagne, en Grèce, au Portugal, en France, en Italie soutenir une thèse des plus grotesques selon laquelle l’Allemagne avait le devoir d’aider financièrement les pays Européens en crise, parce que selon eux, l’argent allemand provenait de la vente des grosses berlines dans ces pays.

Ce genre de raisonnement trahit l’état de déconfiture de ces économistes qui ne sont tout simplement plus en mesure de comprendre que l’Allemagne n’a pas les moyens de se sauver elle-même et que la crise allemande n’est plus qu’une question de temps comme pour tous les pays occidentaux qui à première vue semblent épargnés, puisqu’ils sont régis par les mêmes modèles économiques. Pire, ce sont les même qui projettent de faire la concurrence à la Chine. Comment peuvent-ils y parvenir, s’ils se refusent à l’exercice le plus facile qui aurait consisté non pas à vouloir partager les gains allemands, mais à se demander comment réussir eux aussi à vendre en Allemagne, premier marché de l’union Européenne.

La vérité est que ces économistes se sont déjà rendus et ont renoncé à se battre, faute d’idée. Et ils sont déjà en train de passer au plan B, d’un Occident qui deviendrait une destination touristique pour les nouveaux émergents. C’est le président américain Barack Obama qui a vendu la mèche le 18/01/2012, en présentant dans un parc d’attraction touristique en Floride son désir de faire des USA, la première destination touristique du monde, au nom de la relance de l’emploi.

Barack ObamaCe que Monsieur Obama ne sait pas, c’est que le tourisme n’a jamais aidé un pays à se développer. La France dont il veut contester la première place avec ses 77 millions de touristes en 2010 (contre 59 pour les USA, deuxième), n’aurait pas les problèmes financiers qu’elle connait, si le tourisme était une baguette magique. Ces économistes occidentaux qui croient avoir trouvé leur plan miraculeux pour sortir de la crise, en prédisposant les infrastructures pour accueillir les nouveaux riches de Chine, Inde et Brésil, doivent se demander pourquoi l’endroit qui attire les touristes fortunés en France, la prestigieuse Côte d’Azur est paradoxalement la région (PACA) avec le plus fort taux de pauvreté de toute la France ? (source Insee). Aucun pays ne peut s’en sortir en s’éloignant des métiers de la production.

Un touriste, fut-il le plus riche du monde, ne consommera jamais la nourriture de 5 personnes et s’il faut importer pour satisfaire à ses besoins, on revient au point de départ, sans compter les problèmes que cela comporte de se spécialiser sur les riches. L’Ile Maurice croyait éviter les problèmes du tourisme sexuels de la Thaïlande des pédophiles occidentaux, en misant sur un tourisme de luxe. 30 ans après, le pays s’est retrouvé la capitale africaine de la drogue, introduite dans les Yachts de luxe et les Jets privés qui ne sont soumis à aucun contrôle, pour ne pas froisser ces riches. Qu’à cela ne tienne, si la crise peut transformer le racisme institutionnel qui faisait que seules les populations de race blanche pouvaient entrer aux USA sans visas, l’engouement touristique du président américain serait un progrès pour l’humanité. Et l’allié de toujours, Taiwan serait le premier à en bénéficier. La vérité est que le nord du monde en crise n’attire plus grand monde, même plus les pauvres du sud.

Concurrence intellectuelle

Selon un article publié par Christine Murris dans le Magazine français Valeurs Actuels du 19/01/2012, en France, sur 16.800 places offertes par les écoles d’ingénieurs en 2011, seuls 14.700 étudiants se sont inscrits. Pire sur les ingénieurs sortis en 2010, seuls 42% sont allés créer des richesses. Les autres ont été engloutis par l’industrie de la spéculation qu’est le secteur financier. Avant même leur sortie d’école note-t-elle, ils sont démarché par plusieurs entreprises d’assurance, de banques pour utiliser leurs capacités mathématiques pour leur faire gagner plus de fric, sans faire d’effort.

Au même moment, sur les 11 universités que compte la troisième ville chinoise de Tianjin, 9 sont des écoles pour former les ingénieurs. En Occident, le pouvoir politique est détenu par des personnes qui ont suivi une formation de droit ou de littérature. EN Chine, ce sont les ingénieurs qui ont le pouvoir politique. On comprend dès lors la différence d’engouement des jeunes chinois et occidentaux pour la formation en métiers de création de la richesse. Mais puisque les 2 parties sont en concurrence, comment s’étonner que toutes les mesures prises en occident contre la désertification industrielle sans toucher aux valeurs mêmes sur lesquelles toute la société s’est bâtie n’est que de la pure propagande qui ne convainc même pas celui qui la dit. La vraie concurrence des nations aujourd’hui est d’abord intellectuelle. Une nation s’en sortira ou non par sa capacité à former et mettre à la disposition de ses usines suffisamment des cerveaux pour penser, pour créer et ensuite seulement on pourra parler de compétition.

L’occident a depuis 2 siècles cru que l’intelligence était le fait de l’ADN d’une population caucasienne dite Blanche. Le défi que l’orient lui a lancé sur ce domaine est colossal et il n’arrive pas à relever le défi, c’est la concurrence des ingénieurs. Un ordinateur, un téléphone est vieux après 3 mois, c’est le défi lancé. Et ce ne seront pas les symboles qui pourront changer la donne.

Communisme dedans, capitalisme dehors

Dans le rapport 2011-2012 du forum des 1600 entreprises Européennes en Chine il est écrit que la Chine est un pays communiste à l’intérieur et capitaliste à l’étranger. Ce rapport qui n’est pas tendre du tout dit que «il doit être particulièrement agréable pour la Chine de pratiquer le libéralisme économique le plus déchaîné à l’exportation tout en continuant à s’appuyer sur les fondamentaux du dirigisme à la soviétique sur le marché intérieur ». Ce rapport de 338 pages, signé par le Président de l’European Union Chamber of Commerce, Monsieur Davide Cucino et son secrétaire général Monsieur Dirk Moens, traduit la frustration de tous les entrepreneurs occidentaux qui ont couru en Chine dans l’espoir de conquérir le milliard de consommateurs Chinois et qui se trouvent à n’avoir pour seule issue louable que d’exporter de la Chine vers leurs pays d’origine.

Tout ceci nous interpelle sur la nécessité de revoir de fond en comble toutes les théories économiques des deux siècles précédents qui ne prennent jamais en considération la possibilité d’un pays de jouer sur deux registres en même temps, le communisme à l’intérieur et le capitalisme débridé à l’exportation. Sans cette réécriture, il n’y a pas de solution au problème de la compétitivité des entreprises occidentales. On pourra même réduire à zéro le coût du travail en Occident, cela ne changera pas de beaucoup la trajectoire de la course vers le mur dès lors que la problématique est viciée par une variable non maîtrisée : le rôle de l’état dans l’économie moderne.

Quelles leçons pour l’afrique ?

FMILes privatisations forcées du Fond Monétaire International et de la Banque Mondiale sont des cathédrales d’erreurs monumentales à ne plus commettre. Céder par exemple au Cameroun l’entreprise publique d’électricité SONEL aux privés américains de AES a été une erreur stratégique de grande importance, non seulement parce que les délestages n’ont pas cessé, mais aussi parce que dans un pays qui veut décoller à partir de ses industries, le prix de l’énergie à commencer par l’électricité doit être conçu dans une politique globale des mesures pour assurer la compétitivité des entreprises, pour qu’elles soient mieux aguerries pour affronter la jungle du marché international, en position de force.

Les recettes que les Africains formés en occident ont appliquées comme du copier-coller en Afrique selon lesquelles il faut taxer tout ce qui bouge est une autre erreur stratégique qui mène droit dans le mur. L’urgence pour l’Afrique est de produire la richesse. Et l’état doit s’activer afin que cette production soit effective et à grande échelle et sa redistribution devienne plus aisée, pourvue qu’il y ait d’abord quelque chose à partager.

L’Afrique doit exporter au maximum ses produits finis, pour constituer un capital de devises étrangères nécessaires au bien-être de sa population. Le prix stratégique de l’énergie (gaz, essence, électricité) est plus important que le bas coût de la main d’œuvre. Taxer les bouts de routes bitumées peut donner l’illusion d’alléger le poids financier de l’Etat en Afrique, mais cela fait juste partie des recettes erronées du système rentier de l’Occident, qui plombent la compétitivité africaine. Il se pose en Occident même le problème de la moralité même de leur système. Le 10 janvier 2012 c’est le PDG de Free, Monsieur Niel qui devenant le 4ème opérateur de la téléphonie mobile en France, en divisant les prix par 5, a mis à nu la mafia rentière d’un capitalisme protégé par l’état pour arnaquer sa propre population.

Les économistes africains doivent s’activer à écrire leurs théories économiques qui prennent en compte les spécificités africaines, les intérêts africains, au lieu d’être dans une attente permanente de recevoir la consécration d’un poste de subalterne dans telle ou telle autre Institution Occidentale. A mon avis, le courage et l’autonomie des économistes Africains de se distancer des formules élaborées par les bureaucrates de Washington, pour trouver leur propre voie, à partir de nouvelles variables purement africaines et revisitées dans un contexte du 21ème siècle ferait honneur à ces mêmes intellectuels car ils auront eu l’ambition historique d’être des précurseurs d’une nouvelle Afrique, d’une Afrique avec leurs signatures, plutôt que, comme ils croient par erreur, qu’ils n’ont de valeur que si sur leur curriculum, il y aura le nom d’une institution internationale qui sont pour la plupart au service de l’occident et donc, contre les intérêts même de l’Afrique.

Ils doivent tous se poser la question : pourquoi après l’échec de l’Union Européenne d’empêcher les Chinois d’investir en Afrique, pourquoi après l’échec de l’administration américaine de freiner les investissements chinois en Afrique, ce sont désormais ces institutions où tous souhaitent aller travailler, qui ont pris le relai ? Comment expliquer que le Fond Monétaire International, plutôt que de se réjouir que grâce surtout à la Chine, l’Afrique soit finalement sortie de la misère, monte au créneau pour tout chambouler ?

Au début du mois août 2011 à Nouakchott en Mauritanie, se tenait l’African Caucus, une réunion rassemblant les pays africains et leurs créditeurs, avec le directeur du FMI à la tête. Ce qu’on retiendra de cette rencontre, c’est l’énervement contre les 1000 milliards de dollars que la Chine a puisé de ses réserves en devises pour l’injecter dans l’économie africaine (pour comparer, le fameux plan Marshall était de 100 milliards de dollars, c’est-à-dire, 10 fois moins). On a vu des scènes ahurissantes des autorités burundaises, très contentes de la signature des contrats avec la Chine, mais plonger le lendemain dans l’angoisse des représailles du FMI. En RDC, c’est par décret du 21/12/2010 que Monsieur Obama a exclu la République Démocratique du Congo de la liste des pays africains pouvant bénéficier du projet AGOA, et exporter aux USA sans droit de douane, à cause des nombreux investissements chinois dans le pays, même si les motivations officielles parlaient du recul de la démocratie.

Paradoxe : pour profiter pleinement des avantages de l’Agoa, et exporter les produits finis vers les Usa, le Congo avait bien besoin que quelqu’un investisse au préalable pour créer les usines de transformation. Et comment lui reprocher d’accepter l’argent chinois ? Qui, faut-il le rappeler n’a aucune odeur lorsqu’il finance les fonctionnaires USA qui prennent ces décisions, y compris son président, mais pue dès lors qu’il s’agit de l’Afrique.

Les municipalités africaines doivent rivaliser d’ingéniosité pour créer de la richesse et donc créer des postes d’emplois à leurs administrés. 90% des bibles utilisées par les nombreuses confréries religieuses aux USA sont imprimées en Chine. Et la plupart de ces imprimeries appartiennent à des mairies qui en tirent des revenus pour bitumer de nouvelles routes, et pour créer de nouveaux emplois dans la commune.

En Afrique ce sont des municipalités capables de créer des ressources qui pourront garantir l’émergence d’un état fort en mesure de résister et freiner les élans individualistes et égoïstes des privés. Sans cela, il n’est pas exclu que le continent se libère du joug de l’occident pour se retrouver avec un joug interne d’une poignée de clans qui installent ensuite et allègrement une économie rentière, exactement le modèle qui est en train de mener l’occident droit dans le mur.

20/01/2012

Jean-Paul Pougala ( ex-vendeur de maïs grillé)

www.pougala.org

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