Pourquoi les équipes africaines de football ont des noms d’animaux?

Des éléphants de la Côte d’Ivoire aux Lions indomptables du Cameroun, en passant par les Lions de la Teranga du Sénégal, les Super Eagles du Nigeria, la liste des équipes nationales africaines de football qui portent des noms d’animaux est longue.

Tout au long de la 28e édition de la Coupe d’Afrique des Nations de football 2012 qui se jouait au Gabon et en Guinée équatoriale, les équipes nationales africaines se sont affrontées tout en fédérant différentes sensibilités politiques.

Toutes défendaient le nom de leurs pays. C’est aussi l’occasion de se rendre compte que pour la plupart, ces équipes portent des noms d’animaux. Des noms des fauves, des noms d’oiseaux et des rongeurs sont souvent donnés à ces équipes.

«Leurs noms sont puisés dans le domaine des Totems et dans la mythologie de chaque peuple, etc., croit savoir Claude Buse Misambo. Cette pratique est à comprendre au niveau de la symbolique et surtout celle des chefs ou des tribus s’inspirent du registre animalier.»

Les forêts et savanes africaines ont beaucoup d’animaux certes. Certains sont traités avec égard pour des valeurs, supposées ou réelles, que les sociétés leurs reconnaissent, et deviennent source d’admiration. D’autres sont même interdits de chasse et ne peuvent pas être mangés.

Symbole de pouvoir et du pays

Pour ce qui est de l’équipe nationale de football de la République démocratique du Congo, même lorsqu’elle change de nom, c’est pour reprendre celui d’un autre animal. Appelée successivement, Lions, Simba et les Léopards (pendant le règne du feu Maréchal Mobutu), l’équipe congolaise sera rebaptisée Les Simba sous le règne de Laurent-Désiré Kabila avant de redevenir Léopards en 2006. D’après Dieudonné Kabeya, journaliste sportif congolais:

«Le nom des Léopards était donné par le président de l’époque qui s’identifiait à cet animal. Pour le président Mobutu, les léopards étaient son totem et représentaient la force et la puissance. Comme à l’époque l’équipe nationale se portait aussi bien, il allait de soi que le symbole de la force portait ses fruits. A un moment donné, même les maillots des joueurs étaient frappés de la tête d’un léopard.»

Visiblement pour intimider les équipes adverses. Cela a été aussi le cas des Lions de la Teranga du Sénégal et des Lions indomptables du Cameroun. Ils ont semé la peur auprès des différentes équipes africaines qu’ils dominaient comme les fauves. Dans la dernière édition de la CAN, Les Lions de la Teranga ont déçu par leur prestation, malgré le nom que porte l’équipe. Trois défaites en trois matches, avec une élimination au premier tour.

Inspirer la peur

Le professeur Kambayi Bwatshia, historien et mentaliste, aborde dans le même sens. «Un nom comme celui de l’équipe du Congo Brazza, Diable rouge, peut facilement inspirer la peur. Le diable est souvent noir. Mais, là, il est rouge. En portant un tel nom, l’équipe cherche à intimider ses adversaires et garantir la victoire. Comme qui dirait, je n’ai pas peur, mais je fais peur aux autres. Il y a ce que j’appelle une positivation de la peur», souligne-t-il.

Dans la quête de leur identité, ces équipes n’hésitent pas aussi à puiser des noms dans les légendes de leurs traditions. Les Eléphants de Côte d’Ivoire rentrent dans cette catégorie. Ces animaux, pachydermes, ont été nombreux en Côte d’Ivoire. Et le pays porte même le nom qui renvoie aux ivoires de l’animal. Ce qui pousse à dire que les choix des noms des équipes ne se font pas au hasard.

«La plupart des animaux se retrouvent dans les armoiries de ces pays. Ce sont souvent des animaux rares et spécifiques, observe Dieudonné Kabeya. C’est le cas des Fennecs de l’Algérie. Les Fennecs sont des renards qui vivent dans le désert du Sahara. Ils sont agiles et malicieux. Ce qui leur donne un avantage sur leurs terres. C’est aussi le cas des Palancas Negras (Les Antilopes noires), spécifiques à l’Angola.»

Au-delà du rapport à la puissance, à la force et au pouvoir, les noms des équipes nationales de football des pays africains «expriment un charisme, un prestige, mais aussi une fierté nationale, précise Dieudonné Kabeya. C’est le cas des Black Stars du Ghana (Les Etoiles Noires).»

Les attributs de l’animal

Il y a aussi une bonne part de superstition. «Au-delà du nom de l’animal, certaines équipes pensent qu’en prenant leurs noms, elles s’en approprient les attributs et les vertus, observe le professeur Hilaire Mbiye, spécialiste en étude des signes. C’est ce qui se passe en plus du signe de l’animal, le lion par exemple, on se croit fort et invincible comme le Roi des animaux.»

C’est ainsi que certaines équipes prennent les noms d’animaux rusés, prudents ou venimeux (les  scorpions pour la Gambie, le Renard, etc.). Ces croyances et superstitions n’ont toujours pas portées chances. Les Léopards du Zaïre en ont fait les frais en 1974. Champion d’Afrique, ils se retrouvent à la Coupe du Monde en Allemagne. Trois sorties, trois défaites, aucun but marqué et 14 encaissés dont 9 lors du seul match contre l’ex-Yougoslavie. Ils se racontent que dans le staff technique de l’époque, il y avait un grand nombre de féticheurs.

Soulignons qu’il y a aussi des équipes qui se démarquent et puisent leurs noms dans le registre humain. Comme Les Pharaons d’Egypte, Les Bafana bafana (entendez, les garçons), et les Warriors du Zimbabwe (Les Guerriers).

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