« La Françafrique a su évoluer intelligemment, elle s’est mis une belle cravate par souci de respectabilité, mais, dans le fond, rien n’a changé. Et pourtant, chaque nouveau locataire de l’Élysée tient à annoncer solennellement que « la Françafrique, c’est fini ! » », la déclaration du journaliste et écrivain sénégalais Boubacar Diop en 2014, garde toute son actualité malgré ce qu’on voudrait faire croire. De Nicolas Sarkozy (2008) à François Hollande (2012) et d’Hollande à Macron, la promesse de rompre avec le rapport de supériorité n’a jamais manqué dans le discours. On se souvient d’ailleurs que durant la campagne présidentielle de 2018, l’actuel locataire de l’Elysée avait annoncé « Ce que nous allons faire dans le quinquennat, c’est surtout sortir d’un passé qui ne veut pas passer. Sortir de la FrançAfrique », il n’en est pourtant rien à la fin de ce quinquennat. Le sommet Afrique-France tenu le 8 octobre à Montpellier en est le témoignage le plus abouti.
Emmanuel Macron veut donner l’image du démocrate éclairé et progressiste en s’adressant à la jeunesse africaine, et non plus aux dictateurs africains qui font barrage à toute évolution. Les résolutions nées de cette assise le démontrent assez bien « J’ai entendu l’appel à mettre en place un fonds de soutien à la démocratie. Nous le doterons de 30 millions d’euros sur trois ans. La France n’en fixera pas les bénéficiaires : cette tâche reviendra à un conseil d’orientation composé de personnalités africaines et de la diaspora. », a promis Emmanuel Macron. Rien d’autre que de la poudre aux yeux des afrosomnolents. A preuve, le démocrate achevé, qui aime pourtant donner des réponses et des leçons, est muet comme une tombe devant les nombreux appels à cesser toute coopération militaire avec les dictatures africaines « amies de la France ». Bien au contraire, Emmanuel Macron s’est fait le premier allié des dictateurs, et même de certains dirigeants qui ont accédé au pouvoir par un coup de force, il y a d’ailleurs à se demander si ce n’est pas avec l’aide du démocrate Macron.
Malgré toutes les annonces pompeuses qui se succèdent depuis les indépendances, Paris a perpétué l’Empire français sous une autre forme : la Françafrique. Un système où se mêlent des mécanismes officiels, assumés, revendiqués (militaires, monétaires, diplomatiques, culturels…), et des logiques de l’ombre, officieuses, souvent criminelles. Un système qui garde une santé olympique avec la complaisance de certaines élites africaines. Edité aux Editions du Seuil, l’ouvrage « L’Empire qui ne veut pas mourir, une histoire de la Françafrique » plonge les lecteurs dans les origines profondes de ce système. Les plumes de journalistes, de chercheurs et autres militants associatifs s’y mêlent pour montrer que, loin d’être en voie de végéter, la Françafrique ne cesse de s’adapter pour perdurer.
R.K.