Alors que le Cameroun amorce l’année 2023 avec la prégnance des nouvelles dispositions de la Loi de Finance 2023, l’économiste Julien Grégoire Onguene scrute les leviers économiques salutaires qui s’offrent au gouvernement.
1-Le choix d’une politique économique du FMI et non du Cameroun
À travers la baisse probable des subventions des produits pétroliers en 2023, l’Etat du Cameroun est pris économiquement au piège des accords avec le FMI. L’Etat veut résoudre une crise de l’austérité budgétaire et non une crise inflationniste ou de la consommation. Chaque mesure de politique économique a un coût et celle qui se prépare aura un coût d’opportunité économique marginal.
2-Le choix du coût d’opportunité économique marginal de la consommation.
La baisse des subventions à la consommation des produits pétroliers va diminuer le multiplicateur de consommation et par conséquent le pouvoir d’achat . C’est incroyable d’entendre le FMI nous demander avec diktat de rompre avec les subventions des produits pétroliers pour l’austérité budgétaire alors qu’il y’a une crise inflationniste qui menace depuis 2022.
C’est un suicide inflationniste qui se prépare. C’est proposer l’inflation à l’inflation. Garder les 700 milliards de FCFA de subventions au profit du budget pour relancer d’autres projets n’est pas la meilleure option. Sauf si, on réalloue cette subvention à la production agricole par exemple. Le meilleur choix est de sacrifier le budget et de protéger les consommateurs, c’est ce qu’on appelle le coût d’opportunité économique pour le consommateur.
3-Simulations en cas de réduction des subventions en 2023
La théorie économique est simple. Si nous réduisons les subventions, il faut reverser ces subventions à l’augmentation des salaires pour résister à plusieurs conséquences:
– Double poussée inflationniste et baisse du pouvoir d’achat en 2023
C’est clair, vous avez baissez le pouvoir d’achat non seulement pour le consommateur des produits pétroliers qui peut-être les taximans, les transporteurs divers, les ménages qui achètent les biens transportés et autres. Les taximans qui doivent reverser les recettes vont certainement renégocier la baisse des recettes chez leurs patrons.
Il y va des autres transporteurs. Leurs salaires également seront revus à la baisse par leurs patrons. Une partie du pouvoir d’achat ayant été absorbé par les produits pétroliers, l’impact va se ressentir au niveau de la baisse des autres produits alimentaires par exemple. On se retrouvera alors vers l’explosion de l’inflation ou double poussée inflationniste et la baisse de la consommation généralisée par rapport en 2022.
– Baisse graduelle de la production en 2023
La consommation des intrants ayant baissée, les entreprises qui sont également des consommatrices auront de la peine à avoir les facteurs de production qui coûteront plus chers, et bienvenue aux coûts de production élevés, augmentation du taux de chômage et baisse de la production et un retour au cercle vicieux de la poussée inflationniste en 2023 des produits issus de ces entreprises.
– Baisse des recettes en 2023
Si le consommateur est en difficulté par la baisse de son pouvoir d’achat et les entreprises en difficulté de production, l’Etat va prélever les recettes fiscales comment pour alimenter son budget ? Que le FMI arrête ce scandale économique qu’il nous propose et revoit les fondamentaux d’une économie. L’économie américaine est assise sur la consommation : l’économie de la consommation, c’est ce que devrait faire le Cameroun, mais puisque nous sommes soumis au diktat du FMI, c’est dommage.
– L’hypothèse d’une crise de la gouvernance dans la gestion des subventions
La réduction des subventions des produits pétroliers ne profitera pas aux consommateurs. La trajectoire que prendra les 700 milliards de subvention que l’on veut engranger inquiète. Même en allant construire une nouvelle infrastructure, les ménages et entreprises ne profiteront pas autant si on n’affecte pas cela aux subventions à la consommation, à la production ou mieux à l’augmentation des l’augmentation des salaires.
5-Recommandations de politique économique
– Augmenter les salaires si on diminue les subventions des produits pétroliers
Les ménages profiteront mieux au détriment d’une direction que prendront les probables 700milliards de FCFA de subventions qui ne seront plus alloués aux produits pétroliers.
– Orienter ces subventions des produits pétroliers à la subvention de la production agricole et industrielle
Le Cameroun a là une opportunité de faire passer la subvention de la production qui oscillait autour de 136milliards FCFA en 2022 à 700milliards, certes ce sera insuffisant, mais en valeur relative ce sera une augmentation du budget des subventions à hauteur de 500% qui pourra booster la production et enclencher les prémices de l’import-substitution.
– Opter pour la subvention à la consommation versus austérité budgétaire*
Le modèle du ménage- consommateur et producteur-consommateur rapportera mieux. Au détriment d’une austérité budgétaire pour la construction d’une infrastructure ou un projet qui rapportera difficilement dans le court et moyen terme.

Dr ONGUENE ATEBA
-Économiste
-Logisticien des transports
-Expert en douane et transit