Soucieux de diversifier son économie, le Tchad multiplie les projets d’envergure en marge du secteur pétrolier : infrastructures, transports, services, etc. Une politique menée par un Idriss Déby Itno plus volontariste que jamais, et qui pourrait bien, notamment grâce à de nombreux investissements chinois, finir par porter ses fruits. Longtemps gangrené par l’instabilité politique, le Tchad relève la tête, et entend qu’on le regarde pour ce qu’il est : un pays africain en plein essor.
Outil de notation et de classement des institutions du secteur public en Afrique, l’Africa Performance Index (API) évalue le développement économique des pays Africains membres de la zone. Dans la version 2015 de cet indice, le Tchad, sur le podium, occupe la troisième place.
Le rapport souligne que « l’amélioration de l’orientation budgétaire du pays et les mesures significatives de réduction de la dette (…) ont permis à la machine économique et financière du Tchad d’opérer dans le bon sens. » Et l’API n’est pas le seul à faire preuve d’optimisme pour l’avenir du pays. S’il est vrai que le Tchad revient de loin, sous la récente direction politique du président Idriss Déby Itno, le pays a résolument pris le chemin de la croissance.
Le Tchad a en effet connu une croissance économique estimée, pour 2015, à environ 7,6% selon le FMI (Perspectives économiques régionales, 2015), soit l’un des taux les plus importants du continent avec le Nigeria. Fort de cet élan – en dépit de la chute vertigineuse du prix du baril de pétrole – l’objectif affiché est la diversification de l’économie, encore largement basée sur l’exportation d’hydrocarbures.
Une meilleure redistribution de la richesse devrait permettre de mettre en partie en place les conditions d’une croissance endogène, préalable au décollage économique. Concrètement, il s’agit de réinvestir les profits des énergies fossiles dans le but de s’en servir comme levier pour la croissance nationale. Depuis dix ans, l’exploitation des hydrocarbures a permis au Tchad de générer plus de 10 milliards de dollars, investis notamment dans le rattrapage du pays en termes d’infrastructures, afin de renforcer le cadre dans lequel les activités (notamment le tertiaire) vont fleurir.
Cette dynamique s’illustre par exemple par la construction de la Cité internationale des affaires, à N’Djamena, pour un coût total de 366 millions d’euros. Cette dernière, composée de bureaux, d’un palais des congrès ou encore de centres commerciaux, sera amenée à jour un rôle majeur dans le développement du pays. En modernisant le visage de N’Djamena, et en constituant un vivier d’entreprises privées, cette Cité internationale constitue la vitrine idéale de ce à quoi le Tchad d’Idriss Déby aspire : se muer en cadre favorable aux initiatives privées, nationales ou internationales. Un défi de taille pourtant loin d’être une utopie.
Les idées, en effet, ne manquent pas : le groupe Geyser, spécialisé dans la construction hydraulique, le forage et le terrassement, a décidé de diversifier ses activités en se lançant dans la production de lait, afin de supplanter le lait en poudre importé dans le pays. Prenant appui sur le boom pétrolier, Geyser a su mélanger vision et ambition, tout en profitant du cadre national propice à l’entreprise.
Tout l’enjeu est là : permettre aux entrepreneurs tchadiens d’évoluer dans un cadre ad hoc. A cet égard, les ateliers de l’entrepreneuriat, mis en place à Lift en mars dernier, et les conventions à venir entre l’Agence Nationale pour l’Investissement et l’Exportation (ANIE), le Fonds National d’Appui à la Jeunesse (FONAJ) et l’Institut Français Tchad (IFT) sont des exemples de projets porteurs. Ils contribuent à la consolidation d’un projet de croissance durable, et à l’établissement d’un niveau de vie supérieur pour la population. La mise en place d’une politique keynésienne de revenus de transfert à destination des ménages va également dans ce sens.
Un autre axe du développement tchadien est l’ouverture aux capitaux étrangers, en particulier ceux venant de la Chine. Une tendance qui s’appuie sur un rapport mutuellement bénéfique : le pays constitue une source d’approvisionnement en matières premières pour la Chine, qui en contrepartie investit sur son territoire.
Depuis dix ans, les relations économiques entre les deux nations sont au beau fixe. Les liens diplomatiques ne sont pas en reste : « L’année prochaine marque la 10ème année du rétablissement de la coopération bilatérale entre la Chine et le Tchad. Pendant ces dix années, la confiance politique mutuelle se renforce davantage, la coopération économique et commerciale se développe progressivement, les échanges humains et culturels s’intensifient », s’est félicité le chargé des affaires de l’ambassade de Chine.
Symboles de cette amitié : la raffinerie de Djarmaya, la cimenterie de Baoré, le Palais de la Démocratie (siège de l’Assemblée nationale), l’Hôpital de la liberté (aujourd’hui appelé « L’hôpital de l’amitié Tchad-Chine »), et la Maison de la Femme. Autant de grands chantiers menés sur le sol tchadien par des groupes chinois.
On le voit, le Tchad cherche à faire peau neuve, en rompant avec son image de pays peu business friendly pour inspirer la confiance des entrepreneurs locaux, mais aussi de partenaires internationaux. Une ambition chevillée au corps de son président Idriss Déby Itno.
En octobre 2015, il se déplaçait ainsi en Chine à l’invitation de son homologue Xi Jinping pour effectuer une visite de travail et d’amitié. Un volontarisme qui paye, puisque selon la diplomatie chinoise les relations sino-tchadiennes se caractérisent par leur stabilité et leur maturité. Gageons que d’autres futurs partenaires internationaux viendront frapper à la porte du Tchad dans les prochaines années.